La question dérange inévitablement. Elle peut même heurter certaines sensibilités mais mérite à tous égards d’être posée. Comment a t on pu tomber si bas? Le sens de cette interrogation hante aujourd’hui la société sénégalaise et prend la forme d’une enquête historique et plus prosaïquement celle d’un jugement moral. Les vraies causes de la violence massive, brutale et surtout assassine constatée ces temps ci sont à mon humble avis à rechercher dans une sorte de décadence morale. Eh oui, constatez avec moi que l’esprit de jouissance, dénominateur commun des mobiles de ces crimes, a fini de l’emporter sur sur le devoir de maitrise et de renoncement chez nous. Une atmosphère sans idéal nous empoisonne depuis fort longtemps d’où les multiples alertes sur le drame manifeste de la crise des valeurs et des modèles. Alors osons le dire, cette série de meurtres qui n’en est qu’une des conséquences des moins achevées ne doit guère nous surprendre. Notre surprise doit plutôt résider dans le fait de devoir contempler ce grand désastre sans essayer de le comprendre ou d’entreprendre quoique ce soit. Une société a toujours trouvé les remèdes à ses maux dans sa rééducation collective et non dans l’astreinte à des sanctions individuelles sur ses fauteurs de l’heure. C’est dans ce sens que je trouve l’idée de l’application de la peine de mort assez aberrante. D’ailleurs ne traduirait t elle pas une soif cachée d’une tentation aux dessins funestes chez une société calme qui entretient le paradoxe de clamer la mort tout en la réclamant en même temps ?Ce qui reste sûr c’est qu’un désastre d’une telle ampleur ne saurait s’expliquer par les seules motivations de tueurs aux mobiles les plus diversement appréciés. Il est plutôt le signe irrécusable d’un effondrement secret mais décisif. Ce en quoi croit aujourd’hui l’homo senegalensis ce n’est pas l’harmonie, la joie commune encore moins la solidarité comme gage d’un destin collectif. Le « Senegal bene bopp la » a cédé la place au » bopp sa bopp » trop loin poussé. Dans l’immédiat, la réalité est celle d’une catastrophe et le peuple ressasse sans cesse sa crainte comme pour mieux mesurer l’ampleur du malheur. La solution n’est sûrement pas dans l’auto protection par le port d’armes, blanches ou « noires ». A l’évidence notre peur restera encore bleue!
Mamadou Ndao Inspecteur des Impôts et Domaines,président du mouvement JE PARTICIPE