« les morts ne sont pas morts » ,cette assertion de Birago Diop est d’autant plus vrai qu’il ne se passe pas un jour sans que l’ombre de Ndongo Lo ne plane parmi nous. En effet Ndongo , ce jeune artiste fauché par la mort à la fleur de l’âge est un de ceux qui tomberont pas dans les tiroirs de l’oubli du fait de la dimension de l’héritage qu’ils ont laissé derrière eux . l’enfant de pikine a quitté ce bas monde la tête haute car ayant marqué son temps et celui d’après à l’encre indélébile . A revisiter ses chansons l’on est tenté de se poser la question de savoir comment en un rien de temps , un jeune de moins de 30 ans a –t-il pu réaliser de telles œuvres .
Arrivé au devant de la scène presque par effraction car être né en banlieue et n’ayant bénéficié quasiment de l’aide de personne, Ndongo affirme haut et fort sa « pikinitè », participant ainsi à la dédiabolisation de la banlieue. En fait le contexte était tel que le succès dans la musique ou dans l’art en général était réservé à une certaine classe. L’artiste tient à ses origines plus que tout au monde et affirme « lumu gudi gudi lumu ledeeum lendeum pikine laay fanaan…. ».
d’entrée de jeu il chanta Pikine à travers l’un des références de sa jeunesse Mohamed Ndao Tyson, d’ailleurs comme par hasard c’est le morceau phare de sa première production. C’est la chanson qui très tôt a fait le tour du monde conférant du coup à l’auteur une notoriété qui sort de l’ordinaire. Ce qui sans doute attira l’attention des sénégalais c’est non seulement la façon de chanter du pikinois mais aussi le style tout personnel et propre à lui. Cinq ans en fait ont suffi au natif de Pikine pour monter à tout le monde que le vrai artiste c’est celui qui innove, qui s’inspire de toutes les situations, avec lui on a appris que ce n’est pas suffisant d’avoir une belle voix mais il était aussi essentiel de la coupler à une inspiration, une intelligence sans faille. Donc l’artiste avait le rare don de disposer de fond et de forme dans ses œuvres ; car nul ne doute de la beauté de sa voix ni de l’extrême rareté de ses thèmes.
Ndongo a su entrer dans le cœur des mélomanes par son feeling (occupation scénique),son look vestimentaire mais aussi par sa voix qui tranchait carrément avec ce que l’on a l’habitude de voir ou mieux d’entendre .
Ndongo , contrairement au personnage de Ben Okri dans flowers and shadows qui avait horreur de se rappeler du moindre détail de son passé rejetant en bloc toute personne ou toute chose susceptible de lui apporter un flashback ; lui (Ndongo) avait l’habitude de faire référence à son passé dans ses discours mais aussi et surtout dans ses chansons .
Ndongo à travers la chanson dédiée à ses amis d’enfance « xaarit » et celle dédiée a momar gueye frère ainé de Ndiamè (celui qu’il surnomma son jumeau) « bu njekoon ku waay danulay genè »fait preuve de reconnaissance car dans un dialogue avec Baye Demba Faye le frère cadet à Mbaye Dieye Faye incite son monde à la reconnaissance car soutient-il « ku fatè lila faal dinga foleku » .
Porte étendard de la banlieue ,il revendiquait haut et fort sa provenance de la banlieue ,pikine , ville qui l’a vu naître et grandir et qui lui était tellement chère qu’il disait « lumu gudi gudi lumu leundeum leundeum pikine laay fanaan ».il fait ainsi partie des premiers qui ont entamé l’œuvre de dédiabolisation de la banlieue ;faire comprendre à qui veut l’entendre que l’on peut venir du plus profond de la banlieue sans moyen et finir à la plus haute marche du podium et ceci seul le travail peut nous le concéder .

Ndongo Lo Niang est venu apporter la rupture à une certaine tradition , bafouer l’ordre qui semblait préétabli constituant la source à laquelle viennent se désaltérer pas mal d’artistes actuels car ce si on prête attention à ce qui est entrain de se passer onze ans après sa disparition on se rend compte que tous font du « Ndongo lo » ;si ce ne sont pas ses paroles , c’est sa voix sinon c’est tout simplement son look vestimentaire qui était propre à lui. Ainsi il avait raison quand il affirmait lors d’une soirée « maan maay guy gu daargui xaleyi ci maan lani janguè yeeg ».
Ndongo lo aura tracé le chemin qui est long et parsemé d’embûches mais comme il le soutient deukou banex boo guiss yoonwi dafay tiss boko gnemè banexu boko gnemewul doo deem baay banexu boko gnemewoul doo deem baay banexu ».il fait partie de ceux qui ont eu le courage de déblayer un terrain aussi cahoteux et si actuellement beaucoup de jeunes ont la latitude de s’affirmer sur la scène musicale ,ils le doivent en partie au disciple de serigne fallou qui affirmait sans cesse serigne fallou « nun sunuy mbiir du jeex ndax yaaw saay mbir du jeex tè aam sang bu dul jeexlè jam baa du jeexlè daraa »il a raison car il s’en est allé certes mais son nom sera gravé à jamais dans les anales de l’histoire.et le commun des mortels sera tenté de se demander comment en si peu de temps un jeune de moins de trente ans peut-il servir au peuple sénégalais un plat si délicieux . ce garçon avait un don indéniable car on se rend compte qu’il lui arrivait de créer séance tenante une chanson (conférez-vous au titre « munumalla bayi »)et ceci me donne l’occasion de rendre hommage aussi à l’équipe de musiciens qui se trouvaient derrière lui (Papis Konate & Co) car suivre avec le rythme un artiste aussi talentueux qu’imprévisible n’était pas chose aisée . il avait vraiment un don pour la chanson de par sa voix et de par ses thèmes.
« Ndanaan su dewè jefje du nul ndax netaliga” disait-il, dans son tube intitulé Galass, au fait cette assertion trouve sa pertinence après la disparition de l’auteur. Ndanaan au vrai sens du terme c’est celui qui aura empreint sa vie d’une ouvre qui fait de lui un inoubliable. L’artiste, le marabout, l’homme politique ou tout simplement l’être humain qui, dans sa vie,qui a travaillé de façon à laisser aux contemporains et aux futures générations un legs tellement utile que chaque jour qui passe est comme une nouvelle naissance pour lui. La richesse et la pertinence de ses œuvres lui confèrent un statut d’« éternel » car tout dans la vie de tous les jours renvoie à une de ses œuvres.
Ndongo est certes parti mais est à jamais présent parmi nous car le vrai artiste ne meurt jamais car à chaque fois que l’on revisite son œuvre est comme une renaissance pour lui ; et lui- même ne le disait-il pas dans son tube intitulé fallou « ndanaan bu dewè jef je du null ndax netaligaa » . les générations contemporaines et celles d’après gagneraient à faire de son œuvre et de sa vie un cahier de route pour affronter la longue marche que constitue la vie.
Ndongo tu allé certes, parti comme un météore mais comme disait julie burchill « les larmes sont parfois une réponse à la mort. Quand une vie a été vécue vraiment honnêtement ,vraiment avec succès ,ou simplement vraiment ,la meilleure réponse à la ponctuation finale de la mort est le sourire » donc Ndongo que t’accueille dans son paradis. 11 likhlass.

SAKHO MALICK (BERGAMO ,ITALIE).

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