Les Sénégalais qui ont suivi l’extrait du journal télévisé d’une chaine privée de la place n’en reviennent toujours pas.
Nous avons tous été estomaqués par ce que nous avons vu : un homme au bord de la transe, tenant une liasse de billets de banque qu’il jetait spasmodiquement devant une assistance aux anges qui lui servait des applaudissements d’encouragement.
Cet énergumène qui s’était signalé par le passé par des injures crues à l’endroit du candidat MACKY doit sans doute se sentir en territoire conquis, ou peut être entièrement acquis à la cause de son mentor sans envergure, pour s’adonner à de telles pratiques.
A sa décharge, la composition et la configuration de l’assistance s’y prêtaient parfaitement : Thierno LO dit Zidane dont on se rappelle les propos de MACKY alors Directeur de campagne du candidat WADE à son endroit, le Colonel Malick CISSE qui claironnait haut et fort de son bureau de la Présidence que le pouvoir ne sortirait pas des mains de WADE, de Me Mbaye Jacques DIOP que le lobbying intense de ses affidés a fini d’imposer auprès du président, à Me Ousmane SEYE protocole jusqu’à Monsieur NIASSE muezzin circonstanciel.
Quelle belle bande. L’ambiance était donc à la sarabande ! Et ils l’ont bien dansée !
J’en connais qui se sont sentis profondément meurtris, dans son entourage. Certains ont été subitement pris de nausée, d’autres ont failli vomir.
Quant à nous, nous avons depuis longtemps percé les signes avant coureurs annonciateurs d’un irrémédiable glissement vers le populisme, le culte de la personnalité et de la démagogie à deux sous.
Le tragique a ceci de particulier que quand elle se noue, cela prête à sourire et à rire, de ce rire africain caractéristique qui montre l’incrédulité, et en même temps l’effroi.
Je ne suis pas alarmiste, mais c’est que le moment est venu, pour paraphraser Sony LABOU TANSI, d’ « inventer un poste de peur en ce vaste monde (le nôtre) qui fout le camp ».
Le geste de Cissé LO est un geste qui consacre le retour d’un style sanctionné il y à peine deux ans ; il consacre aussi la victoire de la démagogie ; c’est l’aveu de faiblesse coupable d’un Président, d’un Chef de parti au pouvoir qui a perdu pied et qui est complètement dépassé par les évènements en même temps qu’il est sous la coupe réglée d’un entourage qui l’a totalement pris en otage.
Cet homme, Monsieur LO, pense sans doute qu’il a une revanche à prendre sur l’histoire ; il nous prouve chaque jour combien notre recul démocratique est profond. MACKY gagnerait à calmer ce tartarin, ses vociférations et ses menaces ne font peur à personne, ses actes avilissent la République et décrédibilisent hautement l’institution dont il est membre. Malheureusement, les tonneaux vides résonnent très fort ; supportons donc ou plutôt endurons les barrissements de l’énergumène comme on supporte le braiment ponctué de pets de l’âne du puisatier qui nous porte l’eau.
Fêter cet anniversaire avec autant d’ostentation, dans un faste scandaleux et avec des gestes aussi répugnants que celui auquel on a assisté trahit largement et à suffisance le véritable visage de MACKY et de ses affidés.
Retenons le bien, c’est l’acte fondateur de la nouvelle orientation d’un régime qui a choisi de renouer avec les travers de notre histoire récente, en en signant l’acte II.
Les mêmes acteurs sont désormais réunis, les autres sont en attente dans les coulisses pour paraitre au moment opportun sur la scène.
Quand la démocratie gémit le peuple pleure, en attendant de crier.
Car, l’histoire se répète souvent, en d’autres cieux, sous d’autres continents.
Le projet de loi empêchant l’éligibilité d’un candidat potentiel pour un certain nombre d’années ( en cas de condamnation de la CREI, osons le dire) est directement destiné à empêcher quelqu’un, que tout le monde connait et qui est présentement à Reubeuss, de se présenter aux échéances prochaines. L’instigatrice de cette loi a fini de faire place nette aussi bien dans la sphère du pouvoir que dans le parti présidentiel.
Après avoir fini d’initier ce projet de loi qui attend elle aussi son heure.
Simplement, rappelons nous bien que c’est le recul des libertés démocratiques qui a été à l’origine de la crise profonde ayant abouti aux conflits dramatiques, comme en Côte d’Ivoire, en Guinée, et plus loin dans l’Histoire, à la prise de pouvoir du dictateur Hitler, avec les conséquences que l‘on sait.
Beaucoup de gens se rappellent que les redoutables SS de l’épopée nazi s’appelaient à leur débuts les SA.
C’était ces brigades de sécurité qui étaient censées protéger les populations, en jouant le rôle d’agents de sécurité de proximité. A l’origine, ils n’étaient pas armés, et semblaient bénéficier d’une bienveillante sympathie de la population.
Au fur et à mesure qu’Hitler montait inexorablement vers le pouvoir, en foulant de plus en plus au pied les règles démocratiques, ces SA sont montés en puissances, jusqu’à l’incendie du parlement allemand et la déposition du Président d’alors. Ce fut leur plus grand coup de manipulation qui consacrera la main mise d’Hitler sur le pouvoir.
Véritables forces de déstabilisations, de délation, redoutables semeurs de troubles, ces SA entièrement acquis à la cause hitlérienne seront finalement les redoutables SS dont le rôle prédominant dans la diffusion de la terreur conduira aux pires exactions perpétrées par le régime hitlérien.
Aujourd’hui, MACKY a créé l’ASP. Encadrés par les forces de l’ordre, ces agents seront chargés de les assister ; ils n’auront pas le droit d’intervenir, mais ils pourront informer les forces de l’ordre pour qu’elles interviennent.
En fait, ils feront de la surveillance, et de la délation. Après la BMS, et la police des mœurs entre autres dispositifs, voici donc une autre structure qui a tout l’air d’une milice en puissance. Ses agents inféodés au régime en place sont potentiellement un danger. On a eu un avant goût à l’UCAD, avec l’affrontement entre les étudiants et les nervis au service de l’Université, pardon, du recteur, semblerait-il.
Et ce n’est qu’un début.
Simplement, cette fois-ci, personne ne pourra dire qu’il n’a pas été prévenu.
Cissé Kane NDAO
Président de l’A.DE.R