Commençons par adopter l’éthique comme règle de comportement, comme s’il s’agissait d’un principe général de conduite obligatoire pour tous sans exception. Cela peut paraître utopique à certains, notamment à ceux dont la spécialité est la combine et la magouille ». Keba Mbaye

« L’indépendance de la justice apparaît comme la condition essentielle d’un Etat de droit où les citoyens peuvent obtenir un jugement impartial et équitable ».

« Nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ».

Le Sénégalais est une personne que nous pouvons qualifier de raisonnable, mais qui peut cependant poser des actes irrationnels de temps en temps. Avec l’indépendance obtenue en 1960, le Sénégal a connu plusieurs changements socio-politiques tels que les problèmes de droits de l’homme, de liberté, d’égalité et surtout des problèmes de justice. Il faut admettre que pas mal de choses ont pu évoluer dans le bon sens et on continue toujours à poursuivre les réflexions pour rendre le visage du Sénégal plus glorieux. Cependant, nous avons récemment assisté à des arrestations arbitraires au Sénégal, en plus du problème de la perception de la justice dont nous souffrions déjà. Le pouvoir judiciaire qui devait arrêter le pouvoir exécutif, est-il indépendant au Sénégal ou est-il plutôt au service de l’exécutif ? En matière de justice, la perception est primordiale.

Le Sénégal d’hier

Au Sénégal, les crises de pouvoir sont une réalité et une nation apprend de l’expérience des prédécesseurs pour pouvoir devenir une meilleure nation. Durant plusieurs années, la population vit sous des régimes dictatoriaux et impuissants face aux abus de pouvoir et surtout aux violations très flagrantes de leurs droits élémentaires. Ces valeurs élémentaires, qui devaient être acquises, ne sont malheureusement pas une réalité dans ce Sénégal moderne où nous vivons. Chaque président a été assisté par la justice qui se doit d’être indépendante, mais qui est malheureusement esclave de l’exécutif. Ce sont nos sœurs et frères sénégalais qui occupent ces postes. Quel est le vrai problème ?

Une démocratie est un travail de longue haleine, car il faut changer les mentalités et préparer le peuple à une culture démocratique. Malheureusement, peu de pays en Afrique en sont arrivés ici et le Sénégal ne fait pas partie de ces pays. L’abus de pouvoir a commencé depuis notre premier président, feu Senghor. En 1963, il vote une nouvelle constitution qui fait de lui, Chef de l’Etat et du gouvernement et il vote en 1967 une autre loi qui lui donne le pouvoir de dissoudre l’Assemblée nationale quand il veut. Plus de moyens de pression des parlementaires sur lui. Senghor durcit le ton et n’autorise que la mise en place d’un syndicat unique, favorable à son régime, l’Union Nationale des Travailleurs Sénégalais (UNTS). Il dissout le PAI de Majemout Diop, et le Bloc des masses sénégalaises (BMS) de Cheikh Anta Diop. Des mesures sont prises pour annihiler toute forme de contestation, qu’elle soit politique, sociale ou économique. Moustapha Lô sera exécuté en 1967 pour « tentative d’assassinat ». D’autres seront lourdement condamnés pour avoir pris part à la tentative d’assassinat ou pour ne pas avoir dénoncé les commanditaires du plan.

En 1962, le président Dia est arrêté avec d’autres ministres, ils sont accusés de vouloir fomenter un coup d’Etat. Le conseiller Michel Aurillac, l’un des plus grands défenseurs des intérêts français, a joué un grand rôle dans la destitution du président Dia. Il fera savoir au président Senghor que l’armée française viendra à sa rescousse si jamais l’armée sénégalaise s’inclinait du côté du président Dia. Immixtion dans nos affaires d’Etat. Étions-nous vraiment prêts pour l’indépendance ?

Le Sénégal d’aujourd’hui

En tant que premier président, Senghor n’a pas vraiment pu poser les jalons de la démocratie. Il a gouverné avec une main de fer. Nous traversons une catastrophe économique et sociale et malgré cela, on assiste à un échec cuisant du président de la République. Par manque de choix, il se tourne vers l’abus de pouvoir et l’arbitraire alors qu’un dirigeant lucide doit faire preuve de raison, de justice, de dialogue et surtout de sagesse. Cela a résulté à des conséquences criantes, car on voit l’extrême pauvreté dans chaque coin de rue sans parler de la misère. Le président, qui a vécu l’injustice de son prédécesseur, a été porté par le peuple sénégalais au pouvoir dans le seul et unique but de changer la situation que le Sénégal traversait, une situation catastrophique.

L’actuel président a été démocratiquement réélu, mais il gouverne comme s’il avait accédé par un coup d’Etat. On sent une atmosphère de peur dans la manière de gouverner et le président récemment réélu est très préoccupé par des dispositifs de sécurité. De quoi le président a-t-il peur ? On sent une peur de détrônement ou de dépossession, une peur totale est abattue sur tous les pouvoirs au Sénégal. Doit-on penser que la peur a quelque chose à voir avec les ressources naturelles ? Certains régimes vivent la peur de d’être poursuivi à la fin de leur magistère et mettent en place des mécanismes pour mettre hors d’état de nuire tous les opposants. Le président actuel, ne pense-t-il pas à s’ériger président à vie pour suspendre une autre alternance politique au Sénégal ?

Le danger de cette manière de gouverner se trouve dans la résistance des populations. Quand la population se rend compte que les lois sont injustes, on assiste souvent à des résistances que nous voyons déjà au Sénégal par des marches et des protestations. On assiste aussi à l’élévation de voix de certains opprimés pour manifester leur indignation face aux abus de pouvoir. Cependant, le Sénégal n’est pas trop connu pour une désobéissance civile. Malgré que le Sénégal soit un pays pauvre, sa population est enfermée dans la passivité et surtout une religiosité confrérique qui est même devenu un opium.

Les magistrats sont sous l’autorité du ministre de la Justice, et conséquemment subordonnés au pouvoir exécutif. Cette subordination est la raison principale de l’impact négatif sur les poursuites pénales. Le Conseil Supérieur de la Magistrature, bien qu’institutionnellement indépendante, dépend du ministre de la Justice sur tous les plans. Cette dépendance s’exprime entre autres par le fait que le chef de l’Etat et son ministre de la Justice en tant que Président et Vice-président du Conseil sont responsables de la nomination, la promotion et la discipline des magistrats.

Mesdames et Messieurs de la Justice

Il est temps que les abus de pouvoir cessent au Sénégal. Le peuple sénégalais est un peuple mur, cependant, quand il commence à ressentir l’injustice, il est capable de réagir pour apporter un changement dans le fonctionnement de l’Etat. Attention ! Mesdames et Messieurs de la Justice, il faut savoir que tous les Sénégalais ont le droit de revendiquer leurs droits quand ils sont violés. Il faut arrêter de bafouer les droits élémentaires des Sénégalais, car on dit souvent que le Sénégal est un exemple en démocratie, mais je crois plutôt que nous avons un long chemin à parcourir.

« Une jeunesse mobilisée est dangereuse, une jeunesse mobilisée est une puissance qui effraye même les bombes atomiques. » Thomas Sankara

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