Le peuple sénégalais ne sera jamais suffisamment redevable de la sagesse de ses vaillants ancêtres, qui auront su, nonobstant notre forte diversité culturelle, « transcender » nos particularismes ethniques, qui se déclinent pourtant en pas moins de 28 groupes linguistiques ! Le point saillant de cette spécificité culturelle bien sénégalaise reste sa grande capacité d’adaptation, d’ouverture et de tolérance, qui lui aura permis d’avoir su garder, sans coup férir, à la tête de la plus haute institution du pays, un premier chef d’Etat de confession catholique, L.S.Senghor, qui aura présidé pendant 20 ans aux destinées de ce peuple, composé pourtant de 95% de musulmans !

La sortie au vitriole de l’ancien chef de l’Etat Me Abdoulaye Wade contre la famille du Président Président Macky Sall appelle à la plus grande vigilance de la part des acteurs de l’arène politique, qui peuvent parfaitement se livrer à de légitimes confrontations de leurs idées et programmes, tout en se gardant de s’illustrer sur le terrain glissant de la stigmatisation ou de l’ethnicisme.

L’arène politique (où l’on se plaît de plus en plus à titiller cette délicate fibre) gagnerait à se départir au plus vite de cette tare politicienne pour éloigner à jamais le spectre de ces basculements sociaux, consécutivement à une atmosphère délétère, inconsciemment entretenue, et qu’une insignifiante étincelle aura embrasé de manière fulgurante. Le drame, encore frais dans les mémoires, de ce pays frère qu’est le Rwanda est suffisamment édifiant à cet égard. Car c’est bien la promotion insidieuse de stigmatisations similaires exacerbées par une certaine «Radio Mille Collines»qui aura conduit à la sanglante tragédie de 1994, avec son bilan macabre de 800.000 morts, et dont ce pays peine encore, 20 ans après, à se remettre !

Les Sénégalais sont légitiment en droit d’attendre de l’ancien chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, compte-tenu de son statut, qu’il incite plutôt, en bon père de famille, ses cadets de l’arène politique à circonscrire leurs légitimes antagonismes dans le strict champ de la confrontation des idées et des programmes, sans céder à tentation de titiller la fibre clanique, voire ethnique. Surenchère pouvant insidieusement conduire sur les pentes glissantes de certaines dérives, qui pourraient douloureusement écorner le tissus social de notre cher Nation, et dont nulle ne pourrait d’emblée se targuer de pouvoir s’en tirer à bon compte !

Il n’est pas du rôle du doyen du sérail politique sénégalais – qui a beaucoup fait pour l’enracinement démocratique de notre pays – de se livrer à un si périlleux exercice de jugement de valeur à connotation ethniciste. Me Wade devrait plutôt aider notre pays à préserver son «exception sénégalaise», tout en gratifiant ses actuels gouvernants de sa riche expérience.

Sans préjudice donc au rôle dévolu à chaque acteur politique dans le concert du jeu démocratique, et au-delà des rivalités politiques bien comprises, parce que nécessaires à une bonne respiration de la Démocratie, la sauvegarde de cette «exception bien sénégalaise» – qui semble bien, jusqu’à preuve du contraire, nous porter bonheur – vaut bien tous les sacrifices, toutes les concessions. Et surtout toutes les retenues!

Le 25 février 2015

Pour le Bureau politique du RDS

Le Secrétaire général national

Mame Mactar Guèye

rdsfulla@yahoo.fr

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