Je n’ai jamais imaginé que la distance qui séparait le Palais de l’Avenue Senghor de la Place de l’Obélisque était si courte. Quand j’ai eu écho de l’organisation d’une marche du PDS (Parti Démocratique Sénégalais) pour le 04 Décembre, j’ai ri aux éclats tellement la tournure prise par les événements me paraissait saugrenue et surréaliste. Mais quand j’ai ouï dire qu’ils profiteraient de l’occasion pour prier afin que le défunt Mamadou Diop reposât en paix, j’ai trouvé d’un goût macabre leur farce. Et ensuite vint la couche de crème empoisonnée sur le gâteau qu’est le report de la marche prévue en raison de la coïncidence avec le Magal de Darou Khoudoss.
Tous ces faits méritent de notre part une analyse lucide. Retrouver la bande de ces arrogants parvenus libéraux à la Place de l’Obélisque est une leçon extraordinaire donnée par la vie et la démocratie à tous ceux qui exercent le pouvoir car la domestication de la volonté du peuple souverain se heurte toujours au mur de la résistance qu'elle finit par ériger. Voir Ousmane Ngom, un mouchoir au nez se protéger des gaz lacrymogènes, contempler El Hadj Amadou Sall en train de ramasser une pierre à jeter aux forces de l’ordre et épier Karim Wade lever une pancarte pour se plaindre de la cherté de la vie vaut bien un détour (même en Falcon 50) à la place mythique, caveau des fantasmes wadiens. Eh oui, la courbe de l’Histoire peut parfois bien emprunter une trajectoire sinusoïdale. Et l’ignorer c’est risquer un réveil brutal et tardif.
Pour tout ce qu’ils ont fait comme mal durant les événements pré-électoraux, les anciens tenants du pouvoir devaient avoir assez de décence et de retenue pour s’abstenir de rendre un quelconque hommage à Feu Mamadou Diop, je me demande comment un bourreau peut revendiquer un statut de rédempteur mais nous sommes au Sénégal. Le pays où le ridicule ne tue point. Chaque jour qui passe nous montre s’il en était encore besoin que Wade aura été pour le Sénégal ce que Lance Armstrong fut pour le Tour de France. Une supercherie monumentale digne de la légende d’Ali Baba et de ses magnanimes quarante voleurs.
La seule fausse note de cette manifestation sera l’absence du Commissaire Arona Sy de ce décor kafkaïen. Il aurait pu relever l’ambiance en donnant plus de piquant à la marche. Hélas ses ‘’conseils’’ semblent plus précieux à la Place Washington.
Quant à l’alibi justifiant d’un report de la marche, il est abject et montre jusqu’où les libéraux sont prêts à aller pour se sauver de la géhenne qui leur est promise. Il y’a une volonté manifeste d’instrumentaliser une communauté pour assouvir des pulsions politiciennes foncièrement en déphasage avec la volonté du commun des Sénégalais. Pour cela, ils comptent faire jonction avec une race d’opérateurs religieux** prêts à toutes les compromissions et juste mus par les jouissances et réjouissances terrestres. Le PDS compte se servir d’une confrérie pour créer la zizanie et en profiter mais c’est méconnaitre l’essence du mouridisme qui a toujours capitalisé ses forces endogènes pour relever ses propres défis tels qu’énoncés par Cheikhoul Khadim. Le fait d’attendre des provisions de l’Etat est un phénomène très récent dans la ligne de conduite des mourides. Ces véreux pyromanes coalisés pourront trouver quelques mercenaires à la périphérie prêts à jouer le jeu mais jamais ils n’auront l’appui des orthodoxes qui comptent dans cette communauté.
L’heure doit être à la vigilance et à la veille citoyennes. Le pouvoir en place doit plus se concentrer sur ce pourquoi il est élu, satisfaire l’autre PDS qui vaille (Parti de la Demande Sociale) et la néo-opposition tirer les leçons de la sanction spectaculaire infligée par l’électorat.
Nous sommes un peuple responsable et savons bien distinguer la bonne graine de l’ivraie. Les hommes politiques gagneraient beaucoup à avoir plus de considération pour les citoyens qui sont loin d’être dupes et qui ne manquent jamais de s’assumer en exerçant leurs droits et devoirs dans toute leur plénitude.
Cette fantomatique marche programmée du PDS présente tous les ingrédients d’un bal de vampires mais le charme de la démocratie réside aussi dans le fait que toutes les parties ont droit au chapitre.
POST SCRIPTUM ** De la même manière qu’il existe des opérateurs portuaires, téléphoniques ou économiques, il en existe d’autres qui se couvrent du turban religieux pour bénéficier de privilèges indus afin mener une vie de nabab.