S’il est vrai que l’un des rôles régaliens de l’état est de veiller à l’intégrité physique et morale de tous ses fils sans exception, il est aussi vrai que la situation des sénégalais qui ont choisi de vivre hors de nos frontières mérite réflexion.

En effet si jadis être émigré rimait avec tous les égards et tous les honneurs, force est de reconnaître que de nos jours le « modou -modou » de manière générale a perdu sa place dans la société.
Cette situation est due à la conjugaison de beaucoup de facteurs. Vouloir réduire la cause de cette situation pour le moins regrettable au simple fait que l’état ait péché dans sa politique d’émigration relèverait de la subjectivité. Au fait les sénégalais des différentes diasporas connaissent dernièrement des mésaventures et des déboires qui attirent l’attention de l’observateur le moins averti.
Les sénégalais de l’extérieur sont traqués comme des bêtes féroces dans leurs différents pays d’accueil et ce qui est étonnant dans tout cela, c’est la proportion qu’est en train de prendre le phénomène mais aussi la condamnation pour le moins timide de la part de nos gouvernants qui sont censés prendre à-bras-le corps les préoccupations de ses fils dont le seul péché est d’avoir choisi de vivre à l’étranger. Nous n’avons pas la prétention de dire que l’état n’a pas l’intention de jouer le rôle qui est le sien pour améliorer les conditions d’existence des émigres mais il faut reconnaître que les méthodes choisies ne pourront aucunement mener aux résultats escomptés.

Pur amateurisme
En fait l’état du Sénégal même si dans ses déclarations laisse entendre que la diaspora est au cœur de ses préoccupations, dans la réalité il semblerait que le devenir de celle-ci est le cadet de ses soucis. Son excellence monsieur le Président de la République Macky Sall lors de sa campagne annonçait déjà que la diaspora sera la quinzième région . Et pour tenir ses promesses à sa manière il est même aller jusqu’à confier le seul département des sénégalais de l’extérieur à trois « spécialistes ». Le fait de confier la gestion des sénégalais de la diaspora au ministre des affaires étrangères, au directeur des sénégalais de l’extérieur et au secrétaire d’état en charge des sénégalais de l’extérieur, au lieu d’apporter une solution au sempiternel problème des émigres, n’a fait qu’embrouiller le système. La guéguerre qui sévit entre le ministre des sénégalais de l’extérieur et ses autres collaborateurs en est une parfaite illustration. Mais croyez moi ce qui dérange dans cette histoire c’est sûrement la nomination tous azimut d’ambassadeurs et consuls généraux. Nous concédons au régime actuel le pouvoir et le droit de nommer qui il veut au poste qu’il veut mais de là à fouler au pied les règles plus élémentaires de la diplomatie relèverait du pur amateurisme.
Le système de nomination de nos représentants diplomatiques et consulaires a forcement des conséquences sur le type de traitement que nous qui vivons à l’extérieur recevons de la part de nos différents pays d’accueil. De manière générale nos représentants manquent de charisme leur permettant de forcer le respect aux dirigeants des pays hôtes, respect qui déboucherait sur la redéfinition de nos rapports.
Le modou-modou est tué, malmené partout sans grande conséquence car l’état adopte toujours la posture du réactionnaire spontané sans suite. Tous les dossiers de nos compatriotes abattus froidement sont classés sans suite.

Cependant ce serait malhonnête de vouloir faire de nos dirigeants les responsables exclusifs de la situation actuelle. L’autre facteur et non des moindres de la crise qui gangrène notre communauté est à rechercher dans la communauté elle-même. En effet si l’essence de toute communauté est de se constituer un bloc, un ensemble dans le but non seulement de résoudre les équations ponctuelles mais aussi et surtout d’anticiper sur les éventuelles crises susceptibles de mettre à genoux le fonctionnement du système. S’il doit en être ainsi dans toute communauté organisée, force est de reconnaître qu’il est temps que nous émigrés, revoyions notre mode de fonctionnement, notre façon de nous comporter au sein de la société. Nous sénégalais de l’extérieur devons apprendre et comprendre que seul dans l’union des cœurs et des esprits que nous parvenons à sortir de cette situation pour le moins déplorable. Tant que l’émigré ne cesse de prendre son prochain pour son adversaire, tant que les modou-modou n ‘arrêtent pas de faire bloc seulement après que l’irréparable se soit produit, ça ne sert pratiquement à rien de déplorer un fait quand on pouvait éviter.

Un crime de lèse majesté
Notre réaction épidermique consistant à vouloir entamer un bras de fer avec les autorités étrangères après certaines injustices dont nous sommes victimes est peut être légitime. Mais n’était-il pas plus intelligent et judicieux d’arrêter d’être une conjugaison et une juxtaposition de personnes mais plutôt une société au vrai sens du terme. Nous sommes comme dirait l’autre « une foule qui ne sait pas faire foule ». Chacun de nous est conscient que le traitement subi par nos compatriotes dans les différentes diasporas est du en partie au fait que chaque sénégalais est comme un électron libre dans un ensemble. Le sénégalais est le seul étranger où qu’il soit, à être agressé, malmené ou même tué sans grande conséquence. Tant que le sénégalais reste un loup pour son prochain, même le diplomate le plus chevronné aura du mal à redorer le blason.

L’autre aspect important est que certains émigrés refusent de manière catégorique de se conformer aux lois et règlements des pays qui les accueillent. Les réalités n’étant plus ce qu’elles étaient, on est en train d’assister à une transformation sans précédant des politiques, qui du reste deviennent de plus en plus intolérantes vis à vis des étrangers. Donc l’émigré doit comprendre que beaucoup de pays surtout ceux européens mis à genoux par une conjoncture économique peu reluisante voient l’émigré comme le principal responsable de la situation. Ces pays mettent ainsi en place des politiques rigides qui n’offrent désormais aucune chance de réussite à l’émigré. Du coup ce qui était considéré comme normal ou simplement tolérable avant est devenu un crime de lèse majesté. Les vendeurs à la sauvette, les marchands ambulants et autres revendeurs de produits contrefaits sont traqués jusque dans leurs derniers retranchements. Donc à situation nouvelle, comportement nouveau. Nous nous devons de changer d’attitude mais surtout d’activité si vraiment nous tenons à vivre en harmonie avec nos hôtes.

En dernière analyse nous dirons tout simplement qu’il est des fois simpliste de vouloir accuser nos dirigeants (même s’ils n’ont pas joué pleinement leur rôle ) ou encore évoquer le thème de racisme ou xénophobie pour justifier certaines de nos mésaventures. Toujours est il que nous émigrés sommes tenus de respecter les règles de bienséance, base de toute cohabitation durable. Nous devons commencer par faire ce qui est notre devoir avant de prétendre à quelconque droit. .

SAKHO MALICK ( BERGAMO, ITALIE)

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