La location en 2011 de capacités de production supplémentaires pour palier le déficit de production d’électricité a permis à la Senelec de satisfaire la forte demande des populations . Toutefois , le coût exorbitant de la location est insupportable pour les finances publiques . C’est pourquoi , le gouvernement actuel a choisi de mettre en oeuvre le mix énergétique , combiné à une restructuration financière de la Senelec. Outre l’énergie , un voile continu de couvrir le secteur des mines. Dans cet entretien accordé à Nouvel Horizon, le ministre de l’Energie et des Mines ,Aly Ngouille Ndiaye a levé le voile sur toutes ces questions les unes les plus stratégiques que les autres . Entretien

L'économie sénégalaise ne repose pas sur l’exploitation minière bien que le phosphate le soit depuis des décennies. Quels sont les espoirs actuels dans ce domaine ?

En effet, beaucoup d’espoirs subsistent dans ce domaine parce que notre pays dispose encore d’énormes réserves de phosphates, de calcaire, d’or, de fer, etc., et beaucoup d’entre elles ne font pas encore l’objet d’exploitation.

Une remise à plat des contrats avec les compagnies minières a été évoquée. Où en êtes-vous ?

C’est vrai, le gouvernement avait demandé, au sortir du conseil des ministres tenu à Ziguinchor, la revue des conventions minières. Nous avons déjà donné les conclusions de cette étude qui se résument ainsi :

• Moins values douanières de 221 milliards sur la période 2005-2012 ;
• Moins values fiscales de 180 milliards sur la période 2008-2012 ;
• Dividendes de 1.2 milliards sur la période 1997-2011 ;
• Redevances de 9 milliards sur la période 1997-2011 ;
• Impôt sur les bénéfices de 32 milliards sur la période 2008-2012 provenant de trois entreprises.

Comme vous le percevez, les retombées sont faibles comparées aux manques à gagner. Et, c’est cet écart qu’il faut réduire, voir annuler afin de permettre au Sénégal de profiter de ses ressources. La prochaine qui démarre sera la révision du code minier après concertation avec tous les acteurs. Le nouveau code général des impôts a été vivement chahuté par les industriels du secteur sur la taxe spécifique au sec- teur. Le CGI étant appliqué, comment cette nouvelle est vécue ?
En fait, si vous faites allusion à la contribution spéciale qui a été instaurée lors de la loi des finances 2012, elle a été payée par certaines industries et d’autres continuent à les négocier avec le gouvernement. Concernant le nouveau code général des impôts qui a fait l’objet de discussions avec tous les acteurs préalablement à son adoption, nous n’avons pas encore de retour en provenance du secteur nécessitant une remise en cause.

L’exploitation de ressources non renouvelables par des multinationales est souvent considérée comme peu productive du fait que les retombées sont souvent faibles. Allez-vous initier une nouvelle politique pour séduire des compagnies minières ?

Les conventions prévoient les études d’impact environnemental, le contrôle périodique de la qualité des eaux, du sol et de l’air et également la neutralisation des déchets. Elles prévoient également, l’ouverture par chaque société en phase d’exploitation dans les livres de la Caisse de Dépôts et de Consignations, d’un fonds destiné à la réhabilitation des sites. A ce jour, ces comptes ne sont pas alimentés en raison de l’absence de plan de réhabilitation des sites approuvés par le ministère en charge de l’Environnement. La procédure est en cours et permettra de mettre de l’ordre dans ce domaine.

Le secteur industriel souffre encore d’une qualité médiocre dans la fourniture de l’électricité. Après le Plan Takkal, envisagez-vous de refondre ce plan ou d’en initier un nouveau pour une bonne production d’électricité et une bonne distribution ?

Le plan Takkal était un plan d’urgence et tout le monde est d’accord que notre pays ne peut supporter les coûts d’un parc de production, dont plus du tiers fonctionnent au diesel oil. Nous nous sommes résolument engagés vers un mix énergétique qui est en marche et qui permettra d'ici 2017 d’avoir 20% d’énergies renouvelables, 25% de charbon, 26% de fuel lourd et environ 20% de gaz naturel avec l’introduction du gaz naturel liquéfié. Le parc de puissances au gaz pourrait évoluer à plus de 35% avec la conversion de puissance au fuel existant à la SENELEC.

La SENELEC telle qu’elle est structurée comme productrice et distributrice, est souvent considérée comme peu productive. Le gouvernement a-t-il une politique nouvelle pour que l’électricité arrête d’être le maillon faible de l’économie nationale ?

En attendant la séparation de SENELEC en entités de production d’une part, et de transport et distribution d’autre part, le gouvernement a fait en 2012 des efforts importants pour marquer le démarrage de la restructuration de la SENELEC. Il s’agit de :

La transformation en capital de près de 128 milliards constitutifs d’anciennes dettes de la SENELEC après avoir annulé une par- tie ;

Une subvention d’investissements constitutifs de ceux réalisés ces dernières années pour 176 milliards ;

La restructuration de près de 70 milliards de dettes sur une durée de 15 ans avec un différé de 5 ans ;

L’augmentation lors de la loi des finances rectificatives de la compensation tarifaire de 65 milliards pour éviter toute hausse du prix de l’électricité.

Quel est l’impact de ces mesures sur la société ?

Comme vous le voyez, les deux premières mesures améliorent la structure du bilan en faisant passer les fonds propres de la SENELEC de 91 milliards en fin 2011 à près de 400 milliards en fin 2012, tandis que la troisième allègera la trésorerie les cinq prochaines années.

Il faut cependant noter qu’à la suite de ces mesures, l’Etat signera avec la SENELEC un contrat de performance pour la période 2013-2015, en vue de fixer des objectifs et les moyens à mettre en œuvre pour les atteindre.

Les ambitions sur le plan de l’électrification sont très élevées. Comment s’y prendre pour rendre accessible l’électricité au plus grand nombre en ne la vendant pas au juste prix ? Le soutien au prix de l’électricité n’est-il pas trop dispendieux pour un Etat dont les ressources sont si faibles ?

Objectivement, nous pensons que les objectifs fixés dans la lettre de développement du secteur de l’énergie sont réalisables. Le mix énergétique permettra de produire à un coût acceptable, ce qui conforte notre engagement de faire dépérir à terme la compensation tarifaire qui je le rappelle est de 105 milliards en 2012 et se limitera en 2013 à 80 milliards.

Pour l’électrification rurale, nous visons un taux de 50% en 2017 passant d’un taux de 23% en 2012.

Des projets subsistaient quand vous êtes arrivés au pouvoir (centrale à charbon, énergie solaire). Lesquels vont être poursuivis et pour quelle raison ?

Pour aller vers ce mix qui doit aboutir à la production du kWh à un coût acceptable, le gouvernement a renoncé à trois centrales qui étaient initiées par le plan TAKKAL pour une puissance cumulée de 210 MW. Il s’agit des groupes conteneurisés, d’une barge et d’une centrale à Malicounda. Nous avons maintenu les centrales au charbon, relancé les discussions dans le cadre de l’OMVS et l’OMVG pour l’hydroélectricité, introduit le gaz naturel liquéfié, l’achat d’électricité produite à partir de la Mauritanie avec du gaz et les énergies renouvelables.

Je dois dire que pour l’OMVG, nous avons tenu le 39ème sommet il y a quelques mois et nous sommes tombés d’accord avec la Guinée sur le partage du productible avec la Guinée. Il en est de même pour la centrale de Sambagalou dont la construction est remise à l’OMVG et pour laquelle le prin- cipe du partage est déjà accepté par les pays membres de l’organisation.

Concernant l’OMVS, depuis plus de six ans, le sommet des chefs d’Etat ne s’est pas tenu. Sa prochaine convocation en Mauritanie permettra de relancer les projets dont certains ont déjà obtenu des accords de financements.

ENTRETIEN RÉALISÉ PAR AMAR NDIAYE (NOUVEL HORIZON)

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