A Mbeuleukhé, dans le département de Linguère, la construction du « daara » moderne non public prend forme avec un rythme satisfaisant. Près de six mois après le lancement du projet, initié par l’Etat du Sénégal, en partenariat avec la Banque islamique de développement (Bid), l’essentiel des travaux est déjà exécuté. D’un coût de près de 80 millions de FCfa, cet établissement devra ouvrir ses portes en février 2018, rassure le coordonnateur du Projet d’appui à la modernisation des « daaras » (Pamod).
Construit en pleine brousse, à près de 5 km de Mbeuleukhé, le nouveau « daara » moderne non public, dénommé Centre islamique El Hadji Daouda Dia, sort de terre. Il a fallu emprunter la route latéritique ou des sentiers sablonneux pour se rendre sur les chantiers. Un mardi matin, la fraicheur matinale est sur le point de céder la place aux premiers rayons du soleil qui s’installent progressivement. L’humidité des précédents jours de pluie se fait encore sentir. Sur une piste sinueuse, jonchée de flaques d’eau de pluie, règne un silence. Une quiétude souvent perturbée par le gazouillis des oiseaux.
Sur les deux côtés de la piste conduisant aux chantiers, des champs verdoyants s’étendent à perte de vue. Bref, le paysage est tout simplement magnifique en cette période d’hivernage. Après une trentaine de minutes de marche, nous voilà sur les chantiers du « daara » moderne de Mbeuleukhé baptisé El Hadji Daouda Dia, du nom de ce grand Moukhadam de El Hadji Malick Sy. Quelques bâtiments imposants, sortis de terre, accueillent le visiteur. Les maçons sont à pied d’œuvre pour les derniers travaux. Un gigantesque mur clôture le chantier. Ce centre islamique est érigé sur une superficie d’une dizaine d’hectares, mais seul les cinq ont été aménagés pour les besoins du « daara » moderne, le reste est affecté aux activités agricoles.
A l’entrée, à gauche, est bâtie la mosquée presque en finition. Il reste juste les travaux de coulage comme le sont déjà beaucoup d’autres bâtiments du « daara ». A droite, sont construites deux grandes salles de classe avec des toits en tôle. A quelques mètres de là, on aperçoit le bloc administratif composé de plusieurs bureaux, de salles de lecture, d’une bibliothèque, d’une infirmerie, d’une salle informatique…
De l’autre côté, sont érigés trois autres classes qui sont également en phase de finition. Au total, l’essentiel des compartiments de cet établissement est presque achevé. Il ne reste que les travaux de peinture et de carrelage. Il convient de souligner que ce « daara » moderne non public, le seul qui existe dans tout le département de Linguère, est construit à Mbeuleukhé dans le cadre du Projet d’appui à la modernisation des « daaras » initié par le gouvernement du Sénégal et appuyé par la Banque islamique de développement.
Perpétuer l’œuvre des anciens
Il s’agit, dans ce programme, de construire 64 établissements équipés, dont 32 publics et 32 non publics. Le projet concerne sept régions, à savoir Louga, Matam, Kolda, Kaffrine, Kaolack, Fatick et Diourbel. Dans ce lot de constructions, toute la région de Louga (y compris les départements de Linguère et de Kébémer) bénéficiera de dix « daaras », dont cinq publics et cinq autres non publics.
Pour rappel, l’idée de création de ce « daara » moderne privé a été longtemps portée par Mame Serigne Dia qui a pu bénéficier de l’appui de l’Etat et de ses partenaires pour la concrétiser à travers le Pamod. Il comprend un cycle élémentaire conformément au programme officiel en vigueur. Cet établissement est destiné à contribuer à l’éducation et à l’enseignement du Coran, de l’arabe et du français doublé d’une formation technique professionnelle.
En effet, les « daaras », dans leur version moderne, constituent une institution qui vise également la promotion effective des valeurs religieuses islamiques d’une part et, d’autre part, l’acquisition des compétences de base du cycle fondamental.
Sur les raisons de la construction de cet institut, son fondateur relève l’intérêt que représente l’éducation dans la vie de l’individu surtout celle religieuse. Selon Mame Serigne Dia, il faut certes s’enraciner dans les valeurs fondamentales de l’Islam, mais aussi rester ouvert aux réalités du monde moderne.
Quelques années après son retour de l’Université Al Azhar du Caire, en Egypte, le directeur du « daara » moderne de Mbeuleukhé s’est vite fixé un objectif : continuer à perpétuer l’œuvre de son grand-père, El Hadji Daouda Dia (un moukhadam de El Hadji Malick Sy). Il aménagea dans la grande maison familiale un « daara » qui recevait une centaine d’enfants pour apprendre le Coran. Se rendant compte que la demande devenait de plus en plus forte, il décide de trouver un autre endroit plus approprié, non loin du village (là où est construit le « daara » moderne). Avec l’appui de bonnes volontés, il est parvenu à construire un petit amphi et deux pièces pour abriter les cours. Pendant plusieurs années, les enseignements se sont déroulés dans cet endroit jusqu’à ce qu’il bénéficie du Pamod.
Allier l’enseignement coranique à l’activité agricole
Sur les 10 hectares du Centre islamique El Hadji Daouda Dia, seul les cinq sont utilisés pour la construction du « daara » moderne, la moitié restante est aménagée pour les activités agricoles. Ainsi, beaucoup de spéculations y sont cultivées chaque année : arachide, mil, niébé, pastèque… Le promoteur compte allier enseignement coranique et activités génératrices de revenus. Dans le futur, Mame Serigne Dia compte élargir ses activités en transformant l’endroit en une zone agropastorale qui sera d’abord doté d’un poulailler et d’un mini-forage pour y développer des activités de maraîchage.
Abdou DIAW
lesoleil.sn