Une gestion de l’État plus transparente et moins dispendieuse : c’est l’objectif du programme rigoureux lancé par le président sénégalais, Macky Sall.
Dépenses publiques : Austérité au menu
« Le gouvernement a compris qu’il devait revoir à la baisse ses ambitions » : Philip English, économiste en chef de la Banque mondiale au Sénégal, confirme les inquiétudes exprimées en avril par le ministre de l’Économie, Amadou Kane. Les caisses de l’État sont vides et le Fonds monétaire international, au terme d’une mission achevée le 15 mai, prévoit pour 2012 un déficit budgétaire au moins aussi important que celui de 2011. Il devrait atteindre 6,4 % du PIB, contre les 5,6 % envisagés avant les élections. « Un niveau clairement insoutenable », estime l’institution.
Le chef de l’État, Macky Sall, a réagi samedi 19 mai en affirmant qu’il faut mettre fin « à la spirale dangereuse de la dette publique ».
« L’effort de transparence est bien réel, assure un observateur international, l’organisation même de l’État est remise à plat. » Réduction des dépenses publiques, fin des dérogations fiscales, suppression de structures publiques et plafonnement du salaire des directeurs…
L’austérité n’a pas totalement remis en cause les promesses électorales. La réduction de la TVA sur les produits de première nécessité (huile, riz, sucre) a déjà permis une baisse sensible des prix.
Énergie : Takkal toujours en course
Initié par Karim Wade il y a un an pour près de 1 milliard d’euros, financé en partie par l’État et par les bailleurs de fonds, le plan de sauvetage énergétique Takkal (« que la lumière soit » en wolof) ne sera pas totalement remis en question. Quelques « options techniques seront ajustées », assure-t-on du côté du ministère de l’Énergie.
Le secteur coûte cher au pays : 150 milliards de F CFA en subventions. Mais les conclusions de l’évaluation en cours devraient confirmer le Fonds de soutien à l’énergie (FSE, destiné à secourir la Société nationale d’électricité du Sénégal, Senelec), tout comme les engagements de l’État.
Concrètement, les contrats de location des générateurs (venus relever la production électrique déficitaire) prennent fin en octobre. D’ici là, quatre générateurs de 15 MW acquis par l’État seront installés, et les vieilles centrales réhabilitées. Quant à la centrale à charbon prévue dans le plan Takkal pour 2015, elle ne verra pas le jour avant 2016 : la Senelec est toujours en négociation avec le coréen Kepco sur le tarif de l’électricité qu’elle produira. D’aucuns pensent caduc l’accord-cadre qui avait été signé au forceps en janvier, sans remettre en question la nécessité d’une telle opération.
Audits : Pas de chasse aux sorcières
Macky Sall l’avait promis : il n’y aura pas de chasse aux sorcières. Mais les enquêtes, évaluations et abrogations des décrets controversés de l’ancien régime ont été lancées. Le président a donné carte blanche à son Premier ministre, Abdoul Mbaye, et à sa ministre de la Justice , Aminata Touré.
Première affaire : Sénégal Airlines. La compagnie lancée en 2010 par Karim Wade accuse un déficit évalué entre 18 et 25 milliards de F CFA selon les calculs. Sa recapitalisation par le secteur privé sénégalais est en cours de négociation. Mais l’heure est surtout au nettoyage, comme le montre la suspension des activités de Daport. Les conditions d’attribution de la gestion de l’aéroport Léopold-Sédar-Senghor sont remises en question. Des audits devraient entre autres, faire la lumière sur la gestion de l’Agence nationale de l’Organisation de la conférence islamique (Anoci), dirigée en 2008 par Karim Wade.
L’État entend par ailleurs remettre à plat les grands projets (autoroute à péage notamment) et regarder comment les intérêts sénégalais pourraient retrouver leur place dans les grandes entreprises privatisées (Industries chimiques du Sénégal, Suneor…). Le secteur des télécoms sera décortiqué. La taxe sur les appels entrants a déjà été supprimée.
Autant de dossiers qui permettront à Macky Sall d’imprimer sa marque.