Vivre sa passion jusqu’au bout. C’est la prouesse de Djibril Diaw qui a embrassé la profession de vétérinaire. Une reconversion qu’il a bien réussie après deux décennies au service de l’État.

Vivre sa passion jusqu’au bout. C’est la prouesse de Djibril Diaw qui a embrassé la profession de vétérinaire. Une reconversion qu’il a bien réussie après deux décennies au service de l’État. Plus qu’une passion, ce métier est un sacerdoce pour ce fils de Mbeuleukhé qui, pendant plus de trente ans, s’emploie à soulager la souffrance des animaux.

Parce qu’il est né dans une zone sylvopastorale, Djibril Diaw ne pouvait échapper à son destin : évoluer dans le milieu de l’élevage. Sa mère possédait un troupeau et chaque jour, il se faisait un plaisir d’amener les bêtes paitre, s’abreuver. « Notre instituteur, Monsieur Tabane m’appelait le berger parce qu’il me voyait toujours conduire le troupeau de ma mère ». Son affection pour les animaux, à cet âge-là, a joué un rôle dans son orientation.

Né en 1951, à Ndiané, un quartier de Mbeuleukhé, Djibril Diaw a fait ses études primaires à l’école élémentaire Amadou Lamine Dia ; même s’il a démarré son certificat de fin cycle à Yang-Yang. Après avoir réussi au concours d’entrée en Sixième, il passe avec brio le concours de l’École nationale des cadres ruraux de Bambey (Encr) option élevage en 1970.

Sa formation achevée et son diplôme en poche, Djibril Diaw voit s’ouvrir les portes de son avenir professionnel. Après un stage pratique d’un an et demi au Centre de zootechnie et de recherche (Crz) de Dahra. Il est ensuite affecté au Crz de Kolda comme directeur adjoint. C’était son premier poste. Il est promu après deux années de service comme inspecteur départemental de Kébémer, puis inspecteur régional adjoint à Diourbel qui comptait, à l’époque, six départements. Bien des années plus tard, il intègre la Société de développement de l’élevage dans la zone sylvopastorale (Sodesp) mise en place après la sécheresse des années 76-77. Djibril met ensuite le cap vers le Sénégal oriental. C’était pour travailler dans un projet de l’Usaid, installé à Mbagnou, localité nichée entre Bakel et Goudiry. Plus tard, il bénéficie d’une bourse pour les États-Unis. Il devait suivre une formation sur la gestion des pâturages. « Pendant huit mois, j’ai fait le Texas, l’Arizona, Dallas et le Nouveau Mexique pour fructifier son expérience ». De retour, il retourne à son poste à Bakel. Auparavant, il a effectué un stage en Afrique du Sud grâce à la Fao, sur la technologie des viandes. Il rejoint plus tard la Direction de l’Élevage.

Une belle reconversion

Après deux décennies au service de l’État, Diaw a pensé qu’il était temps d’ouvrir un nouveau chapitre de sa vie. C’était en 90. « Après vingt ans de service, je voulais faire autre chose en free-lance. J’ai fait un départ volontaire et ouvert un cabinet vétérinaire. Diaw a choisi cette voie professionnelle et était le précurseur dans la zone. Avec son véhicule, il a sillonné le Djolof d’Est en Ouest, du Nord au Sud, est allé au contact des éleveurs pour vivre sa passion : diagnostiquer des maladies, prescrire des traitements, vacciner. Il menait des tournées d’un à trois mois dans la brousse.

« Un ancien directeur disait : celui qui n’aime pas les plantes n’aimera pas les animaux ; celui qui n’aime pas les animaux n’aimera pas non plus l’être humain. C’est dire que dans ce métier il faut non seulement aimer la brousse mais aussi les animaux et les risques ».

Les débuts furent difficiles pour la simple raison que les éleveurs ne connaissaient que le public. Ils ne connaissaient pas le privé. Ce n’était pas encore dans leurs mœurs. Djibril Diaw était sollicité. De jour comme de nuit, il allait dans les zones les plus reculées pour répondre aux demandes des éleveurs, dispenser des soins préventifs et curatifs aux animaux. C’est au cours de ses nombreuses tournées qu’il s’est fait un nom. Très aisé dans le domaine relationnel, il avait réussi à gagner la confiance des éleveurs à force de dispenser des services de qualité. Son vécu professionnel a parfaitement répondu aux attentes qu’il nourrissait dans l’enfance. Et son métier, assure-t-il, il ne le remplacerait pour rien au monde.

De l’avis de Diaw, le métier de vétérinaire a beaucoup évolué. « C’était un corps d’élite qui n’était pas ouvert à n’importe qui. Les études étaient difficiles et il y avait à l’époque des promotions de 5 ou 7 étudiants au maximum. Contrairement aux autres sections comme les Eaux et forêts, le Génie rural, l’Agriculture. Dans notre promotion, nous étions quatre Sénégalais et un Mauritanien », indique –t-il.

Passion pour l’histoire

Djibril Diaw, passionné par la connaissance du passé, s’est beaucoup intéressé à l’histoire de son terroir. Il a subi l’influence de ses oncles et aussi de sa tante Madjiguene Ndao. « Mon oncle Ass Mbengue m’a beaucoup appris sur l’histoire du Djoloff. C’était un passionné. Il connaissait le nom de tous les chevaux d’Alboury ». Ses déplacements à l’intérieur du Djolof lui ont permis d’assouvir sa soif de découvrir toutes ces histoires intéressantes qui se sont déroulées il y a des siècles. « Je profitais de ces tournées pour discuter et avec les anciens qui partageaient leurs connaissances et leur enthousiasme. J’ai aussi fait des enquêtes, des recherches pour comprendre les événements passés. Un jour, le professeur Malick Ndiaye, envoyé par le président Abdou Diouf pour enquêter sur l’emploi des jeunes, est venu me trouver. Notre génération est la première à mettre en place une association dans la zone : Regroupement pour le développement de Mbeuleukhé. Nous avons implanté un périmètre maraîcher avec le financement d’Africare. Après nos échanges, il m’a suggéré d’écrire parce que j’avais beaucoup de matière », explique Djibril Diaw.

En un demi-siècle de carrière, il a accompli énormément de choses grâce à l’élevage ; même s’il croit dur comme fer que ça relève du Bon Dieu. « J’ai eu la chance de m’occuper de mon père pendant 27 ans et de ma mère pendant 37 ans » confie-t-il.

Malgré ses expériences à l’extérieur, la tentation de rester ne lui a jamais traversé l’esprit. Il y avait beaucoup d’opportunités aux États-Unis et en Afrique du Sud. « On a essayé de me retenir. Après ma formation, il y avait au Botswana un complexe pas comme les nôtres, qui abattait quotidiennement plus de 2000 vaches. Ils voulaient me recruter. Mais j’ai décliné l’offre », indique-t-il. Sans regret.

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