En ce début d’après-midi du samedi 22 Octobre 2011, comme d’habitude, j’ai quitté mon domicile, et m’en allai rendre visite à Pape Gallo Niang pour m’enquérir de ses nouvelles et tenir compagnie à un malade qui venait juste de sortir de l’hôpital.

Arrivé chez lui, il me toisa, les yeux tristes et, comme perdus, reflétant sa souffrance tue avec dignité. Il m’invita gentiment à m’asseoir. Après de salutations courtes cette fois-ci, il m’informa du décès de son cousin Pape Talla Niang.

Devant cette triste nouvelle, je me sentis sonné par la mort brutale de l’infatigable Pape Talla, connu pour s’être dépensé sans compter pour la défense des intérêts du XERR, cette zone du Djoloff tant oubliée.

Alors, défilaient dans ma tête les discussions que nous avions souvent tous les trois alors que la voie tremblante de Papa Gallo témoigna, dans un air de désolation : « kou baaaaaaakh ».

Aussi, le jeudi 27 Octobre, c’est encore avec une profonde tristesse et une indicible émotion que j’aI appris la disparition de ce même Pape Gallo.

Une semaine sombre pour Mbeulekhé et tout le XERR qui, en l’espace de 5 jours, ont perdu deux hommes qui ont beaucoup apporté à leur terroir, le Djolof.

La vie de ces deux hommes et, désormais aussi, leur mémoire, sont indissociablement liés à l’histoire de ce terroir.
Infatigables passeurs d’idées et de projets, ces bâtisseurs, dotés d’un profond amour pour leur terroir, ont, de façon constante et désintéressée, mis leur intelligence et leur énergie au service d’une seule, mais ô combien noble ambition : servir le Djolof qu’ils aimaient tant l’un et l’autre, servir son prochain.

De Pape Talla, je retiendrai l’image d’un homme qui a tout donné pour le rayonnement des villages du XERR : projets de construction de points d’eau, d’écoles, de postes de santé, d’électrification etc.

En effet, Pape Talla n’a jamais cessé de se démener sur tous les fronts avec ses amis en vue de construire et de développer le «XERR. Son nom restera lié à tant d’actions menées de manière aussi désintéressée qu’opiniâtre en faveur des populations du XERR longtemps reléguées au dernier rang.

Pape Talla était un homme d’action et un médiateur qui a mis toutes ses capacités et son entregent au service du XERR qui lui est redevable de beaucoup de réalisations aussi vitales les unes que les autres. L’histoire retiendra par exemple cette action sociale à l’endroit des populations de Mbeuleukhé à la fin des années 80. L’homme avait réussi, en partenariat avec la croix rouge, à amener 7 camions remplis de vivres pour les populations. Une aide accueillie comme une bouffée d’oxygène car ce fut une période de soudure pendant laquelle les populations ne savaient plus à quel Saint se vouer.

Quant à Pape Gallo, un sentiment filial me liait à lui, tant il me considérait comme son propre fils alors que le sort a voulu qu’il soit un beau – frère.

Nous eûmes l’occasion de discuter de tous les sujets car tant était grande ma curiosité et mon désir inassouvi de  mieux connaître notre contrée. Ouvert, intelligent, parlant aisément, posément et à intelligible voix, il se servait de ce don pour redresser sans relâche une morale en berne, ressouder ce qui a été brisé, remobiliser des personnes autour d’un idéal commun. L’homme recelait la sagesse digne du vieillard qu’il n’était pas et qu’il mettait au service des autres en incarnant les plus hautes valeurs morales du descendant de Beurguel qu’il était.

Son incomparable éloquence et sa modestie illuminaient la voie de ceux qui l’ont connu et qui ont sollicité son avis ou ses conseils sur telle ou telle question. C’était un homme exceptionnellement disponible dont tout en lui subjuguait et fascinait à la fois. Ainsi, plus de la moitié des habitants de la cité La Rochette, où je vivais avec lui, lui confiait soit une maison, une famille, un bien matériel ou financier etc. Et il a toujours joué ce rôle de protecteur sans anicroches et sans intérêt aucun en retour. Son bonheur, c’était le bonheur des autres. Et aussi, sans même le chercher, il était finalement devenu l’alpha et l’oméga de tout ce qui se faisait autour de lui. L’homme a ainsi contribué à la construction de la mosquée et de la morgue de la Cite La Rochette. Au lendemain de sa première hospitalisation, nous l’avons vu, énergique malgré la souffrance, escalader une échelle pour aider les maçons qui s’activaient aux travaux de finition de la terrasse de la mosquée du quartier. Ce ne sont là que menus services par rapport aux services qu’il rendait  à ses collègues et aux passagers du train Dakar-Kidira.  Ses actions pour le Djolof et ses habitants sont inscrites en lettre d’or dans le cœur de ses derniers. Un livre ne suffirait pas pour les énumérer. Pape Gallo était non seulement un homme bien mais aussi un homme de bien.

Ils étaient deux amis fidèles que tout unissait.

Pape Talla et Pape Gallo étaient, à plusieurs titres, de très proches parents. Par delà le sang, le destin inexorable les a, à nouveau, réunis dans leur chère terre du Djoloff qu’ils se sont efforcés de servir avec conviction et persévérance.
C’est pourquoi la proximité, sinon coïncidence, de ces deux malheureuses disparitions leur a, à nouveau, valu les hommages unanimes que tout le Djoloff leur a rendus.

Reposez donc en paix dans cette terre, synonyme d’honneur et de fierté, que vous avez toujours aimée et tant servie.

INNA LILLAAHI WA INNA ILEYHI RAAJIHOUNN

EL Hadji Daouda DIAW

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