La référence faite à ces deux personnages dans le titre pour parler ou plus précisément commenter le séminaire international sur la recevabilité de la candidature du Président Abdoulaye Wade à l’élection présidentielle de février 2012 peut sembler ,à priori, aux yeux de certains un peu décalée ou en tout cas détachée de cette polémique ,qui défraie ,si effroyablement ,la chronique dans notre cher pays.

Les commentaires autour de la lutte, qui jadis tenaient en haleine nos compatriotes dans tous les lieux de rencontre se voient subitement tus ,le temps de quelques instants ,pour céder la place à des cogitations aussi intenses et savoureuses les unes que les autres, qui pour confirmer cette candidature, qui d’autre pour l’infirmer, installant ainsi le Sénégal dans une véritable controverse intellectuelle dans laquelle certains cassandres perçoivent déjà un certain chant du cygne, que le bon Dieu nous en préserve ! C’est la preuve de l’identité multidimensionnelle du génie de notre peuple dont la capacité d’adaptation et surtout de mutabilité sont sans commune mesure dans toute la région du monde, excusez mon parti pris patriotique si j’exagère un soupçon.
Le fait que dans un pays comme le Sénégal que certains, grisés certainement par l’intelligence de ses enfants, et surtout la solidité et l’ancrage républicain de ses institutions, je rappelle en passant qu’à ce jour, c’est le seul et unique pays dans notre sous région à n’avoir pas connu de coup d’état militaire, poussant ainsi  leur admiration jusqu’à proclamer orbi et urbi que c’est une terre française en AFRIQUE, mettant en épochè notre souveraineté le temps d’une hystérie nourrie par un émerveillement illuminé, je fais exprès d’être redondant, qu’on polémique de manière  experte sur la lisibilité d’un article de constitution, n’est que normal. Car c’est le signe clinique, s’il en est, de la vitalité de notre démocratie, et de l’esprit démocratique des sénégalais aussi. Ailleurs, suivez mon regard et mon doigt, la  polémique s’ébruite avec le crépitement des kalachs, que Dieu nous en   garde aussi.
Ce qui est insolite dans cette affaire, c’est la convocation d’experts étrangers dont deux éminents professeurs de droit constitutionnel français pour jouer les arbitrages et, in fine, dire, doctement, le droit. Lequel avis devrait, en tout cas c’est le vœu des maitres d’œuvre de ce raout ranger et aligner tous les sénégalais et tout ce que ce pays compte comme exégètes connus et reconnus même jusque dans le quartier latin dans l’hexagone derrière leur avis d’autorité expert. Certains dialecticiens de l’histoire me rétorqueraient en m’apostrophant comme le font souvent les avocats quand ils plaident, que l’expérience n’est rien en soi hérétique car nous vivons dans un monde mondialisé où le savoir est devenu transcendantal vis-à-vis des frontières physiques et des barrières psychologiques instaurées par les processus primaires du micronationalisme. Je veux bien, mais dans cette optique dynamique et cette nouvelle orientation de l’histoire, il doit y avoir  une symétrie par rapport à l’émergence du nouveau standard d’évaluation en termes de gouvernance politique et démocratique. Autrement dit et pour être pratique, pragmatique et focus comme disent les canadiens, pourquoi l’un des experts français, hier dans une émission sur la chaine privée TFM qu’animait le brillant et performant Mamadou Ibra Kane, à une question que ce dernier lui a posé sur l’expérience française pour avoir un éclairage qui soit réflexif sur la question préjudicielle au Sénégal, a eu une réaction presque émotionnelle et épidermique lui demandant de stopper net, et de se mêler de ce qui le regarde, car cette affaire de la limitation des mandats à deux en France ,est une affaire franco française qui ne regarde que les citoyens français et personne d’autres. Et je rappelle  en France l’option de la limitation des mandats à deux n’est pas une règle écrite  nulle part. C’est un consensus de gentlemen agreement que les politiciens français se sont tacitement passés dans le cadre de la moralisation de leur vie politique. Cette réaction brutale et musclée du français rappelait fort à propos la même que le   général Dégaule avait dans un autre contexte, c’est vrai celui de la colonisation, au président Fulbert Youlou de l’ancien Dahomey, « mon gouvernement ce n’est pas toi le négre. »
Alors qu’est ce que c’est que cette logique consistant pour des valeurs sensées être universelles, cet standard de gouvernance politique sensé nous régir tous, autant que nous sommes en tant qu’acteurs dans la marche mondiale du monde, qu’on veuille l’implémenter dans toute la rigueur de leur texte pour les peuples d’occident ,et les biaiser sous nos tropiques ? C’est ça, dans toute sa nudité, l’universalisme particulièrement  arrogant  et remarquablement sélectif de l’occident auquel il convie hypocritement « le tiers monde » !!!
La mondialisation sous toutes ses formes, est le nouveau paradigme imparable et irrésistible de la marche du monde. Comme disait   Abdou Diouf, pour ne pas le nommer, on ne peut pas arrêter les vagues déferlantes avec ses petits doigts parlant des vagues migratoires de jeunes africains vers l’eldorado occidental, mais nous devons à tout pris protéger et préserver les spécificités de nos identités remarquables propres. Car comme disait Emile Durkheim « Chaque société a ses propres valeurs déterminées par les conditions dans lesquelles elle vit, et on ne peut lui en inculquer une autre si élevée qu’elle soit sans la désorganiser et la désorienter ».
Nos dirigeants actuels comme futurs doivent éviter de présenter un visage boursouflé de nos pays à l’étranger. Des questions aussi graves et sérieuses que notre loi fondamentale, la loi des lois, instrument d’équilibre de notre corps social et politique, doivent être discutées, interprétées par les citoyens de ce pays, qui en ont seuls l’intelligence, en tant que capacité de recul nécessaire parce que fortement imprégnés de tous les déterminismes  d’ordre socio culturels qui sont à la base de sa pondaison comme résultat de compromis et de consensus dynamiques de l’ensemble du peuple à travers ses segments les plus variés. Le temps est arrivé que nous aussi nous fassions du nombrilisme sans verser dans un sectarisme synonyme de la négation de l’altérité chez l’autre, une émergence au sens holistique du terme  qui se veut viable et durable, et construite sur du roc, doit être à ce pris là.
En toutes circonstances, quelles que soient les divergences contingentes qui nous opposent, quels que soient les enjeux qu’elles charrient, par ailleurs, l’élite politique doit avoir une bonne dose de recul et de retenue, et savoir que le monde est vaste, et on n’y compte pas que des amis. Et l’histoire plus prégnante que jamais, n’en déplaise un Francis Fukuyama qui la décrétait comme finie, est là pour nous le rappeler. Il n’y a pas longtemps un chef d’Etat, ancienne puissance colonisatrice de surcroit, est venu nous trouver ici chez nous alors qu’il nous chasse tous les jours de chez lui comme des bêtes immondes, montant sur l’estrade d’un des amphithéâtres de notre sanctuaire du savoir, la mythique université Cheikh Anta Diop de Dakar , nous regardant sans sourciller pour nous dire goujatement  que nous n’étions pas suffisamment entrés dans l’histoire. Quelle insanité ! ! Quel mépris !!! Quelle arrogance et suffisance !!!. Nous en souviendrons toujours de cette claque herculéenne.
Avant lui un autre sans commune mesure avec le petit à la petite histoire, s’était montré plus assassin encore et toujours ,et, ce avec la caution bienveillante de l’establishment intellectuel, politique et économique de l’époque, car sa philosophie était élevée au rang d’Etat, donc incontestable, malgré quelques escarmouches du jeune Marx, je veux parler de Hegel. Lui avait, simplement, exclu l’Afrique et l’homme noir du processus historique. Excusez-moi de rapporter ici ses propos choquants qui gardent malgré la jalousie du temps toute leur force d’impertinence, leur charge déshumanisante, leur ferment de révolte, et d’indignation renversante. Hegel disait : « Le continent africain, du fait qu’il est chaud, sec et aride, n’est pas favorable au déploiement de l’idée absolue. Le jour de l’histoire, l’Afrique était encore enveloppée dans la couleur noire de la nuit, le négre, représente l’humanité dans toute sa barbarie et sa pétulance. ».Je rappelle que chez lui l’idée absolue est un concept philosophique et constitue le moteur de l’histoire. Sa manifestation, par voie de conséquence, est une preuve tangible de ce mouvement. Laissons Hegel avec ses convictions abstraites et systématiquement spéculatives pour revenir sur terre.
J’espère que le séminaire d’hier ne constitue pas une sorte de confirmation posthume de Hegel pour cet opus aux flèches assassines et empoisonnées décochées sur le dos de notre chère Afrique qui malgré tout plie mais ne rompt pas. Autrement,  il ya vraiment lieu de nous arrêter et de nous réajuster. Car,  on ne postule pas à l’émergence avec tant de passifs dans notre passé…et notre avenir aussi, mais surement pas dans notre futur. Parce que je suis convaincu que tous les deux ont systématiquement tout faux.

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