Avec un salaire mensuel dont le plancher est à 2 millions de francs, un véhicule de fonction et 1 000 litres de carburant, le statut de membre du bureau du Parlement a de quoi susciter des convoitises. Présidents de commission et vice-présidents de groupe ou députés élus aux Parlements sous-régionaux comme la Cedeao ont, également, un traitement que leurs collègues, simples parlementaires, leur envient.
Ce n’est pas que le titre pompeux de «monsieur le député» ou de l’écharpe aux couleurs vert, jaune et rouge qui font courir les candidats à la députation. Il y a davantage de choses que l’électeur lambda non-initié aux réalités de la vie parlementaire ignore. De tout temps, les renouvellements du personnel politique de l’Assemblée nationale (le Parlement, plus généralement) se sont révélés des moments de convoitises entre acteurs du champ politique titulaires du mandat de député ou de sénateur. Des convoitises telles que c’est, généralement, le parti ou même le cabinet du président de la République – n’en déplaise à Montesquieu et à sa théorie sur la séparation des pouvoirs – qui prennent les choses en main pour récompenser les plus fidèles, blâmer les récalcitrants et, le cas échéant, contenir les vagues que pourraient occasionner ces moments de redistribution des privilèges.
Et ce n’est pas pour rien que, pour la coalition victorieuse, Benno Bokk Yaakaar, c’est le chef de file lui-même qui est monté au créneau pour imposer ses hommes et rabattre le caquet à certaines têtes brûlées comme Moustapha Cissé Lô ou Youssou Touré dont les visées ont été jugées disproportionnées par rapport à leurs poids et compétences respectifs. Au-delà, toutes les législatures post-alternance n’échappent pas à cette frénésie des moments d’élections. S’il en est ainsi, c’est que les anciens tenants du pouvoir, libéraux jusque dans la distribution des rentes et avantages, ont multiplié par deux, voire trois les traitements des parlementaires. Ainsi, depuis une fameuse audience entre le président de la République et le bureau de l’Assemblée nationale en 2005, option a été prise de réviser la grille de rémunération de nos représentants qui se plaignaient de… la misère dans laquelle ils moisissaient.
Ainsi, pour un parlementaire simple, le salaire passait de 600 mille à 1 million trois cent mille francs. Son collègue, président de commission ou vice-président de groupe parlementaire, émarge pour un traitement de 1 million cinq cent mille. Quand il est membre du bureau (vice-président, secrétaire élu, questeur ou président de groupe parlementaire), il bénéficie des mêmes salaires et avantages que les membres du gouvernement : une voiture de fonction, un revenu mensuel supérieur ou égal à 2 millions de francs, 1 000 litres de carburant, une consommation de téléphone plafonnée à 500 mille francs, un secrétariat, un chauffeur pris en charge par le budget de l’Assemblée nationale et, éventuellement, un logement de fonction.
Des avantages en nature non négligeables
S’ils sont membres du Parlement de la Cedeao, les députés sont encore plus gâtés. «Les députés membres du parlement de la Cedeao bénéficient de traitements plus intéressants comparés à leurs collègues des autres parlements», renseigne le député Me Abdoulaye Babou membre du parlement panafricain de Johannesburg. «Par contre, à notre niveau, en tant que membre du parlement panafricain, ce n’est pas si attrayant que ça. En effet, s’il s’agit d’une mission statutaire, c’est l’Assemblée nationale qui nous prend en charge et on voyage en classe affaires avec des per diem qui tournent autour de 180 000 francs cfa. Les frais de voyage sont également pris en charge par l’Assemblée nationale du Sénégal», explique le député Babou. Par contre, précise-t-il, «si c’est le parlement panafricain qui envoie un député sénégalais en mission, les per diem sont alignés sur ceux des fonctionnaires de l’Union africaine. Et on voyage souvent en classe économique».
Cependant, depuis l’arrivée de Macky Sall au pouvoir, toutes les missions de ces députés sont arrêtées. On ne voyage plus au nom de l’Institution. En attendant bien sûr la mise sur pied de la future Assemblée nationale. Comme avantages en nature, les députés et sénateurs simples ont droit à 150 litres de carburant, un passeport diplomatique et à un véhicule de type 4X4. Mais, ils prennent en charge les frais liés à leur personnel de compagnie (chauffeurs, gardes du corps, etc.). Ces véhicules sont d’ailleurs affectés à l’ensemble des parlementaires sans distinction de fonction. Mais, en plus de ces véhicules qui sont indifféremment affectés aux parlementaires, les présidents de commission et vice-présidents de groupes ont droit à un véhicule de tourisme (C5 pour la présente législature, 406 pour la précédente). Et pour permettre aux représentants de la nation de ne pas connaître des fins de mois difficiles, un «fonds de solidarité» a été mis en place depuis le début de la 11e Législature.
Ibrahima ANNE & Georges Nesta DIOP