Au lendemain de la publication de l’article sur les «excentriques hommes du Président» Wade, l’ancien ministre Adama Sall s’est déplacé à la Rédaction du journal Le Quotidien pour livrer sa part de vérité. Réfutant d’emblée être «un cas d’école» en matière de mauvaise gestion, M. Sall brandit des documents comme preuve de sa bonne foi et de la cabale politique dont il fait l’objet, pour justifier les faits pour lesquels il a été épinglé par un rapport de la Cour des comptes, condamné par le Tribunal correctionnel avant d’être relaxé par la Cour d’appel. Des décisions de justice qui le blanchissent des délits de détournement de deniers publics, corruption, faux et usage de faux, prélèvement illégal d’intérêt mais surtout qui le réhabilitent par rapport à l’interdiction de gestion publique. Un entretien à bâtons rompus, ponctué d’invocations coraniques d’un homme jurant à chaque bout de phrase : «Bilahi, walahi, watalahi».
VERITES JUDICIAIRES
«Je suis venu chez vous pour réagir sur l’article qui a été écrit sur moi et qui a été repris par plusieurs sites d’informations. Vous dites que je suis un cas d’école. L’arrêté de Mme Théo Cissé Doucouré me suspendant de mes fonctions de président du Conseil régional de Matam fait suite à la condamnation du Tribunal correctionnel de première instance. Le Tribunal m’a relaxé du chef de détournement de deniers publics et m’a reconnu coupable de prise illégale d’intérêts et des délits de corruption active de fonctionnaire. Le tribunal m’a condamné à deux ans d’emprisonnement avec sursis plus 300 mille francs Cfa d’amende ferme et m’a déclaré à jamais incapable d’exercer une fonction publique.
C’est sur cette base que la défunte ministre des Collectivités locales a pris la décision de me suspendre de mes fonctions. Je lui ai dit que ce n’est pas juste puisqu’une condamnation en première instance qui a fait l’objet d’un appel n’existe pas juridiquement. Elle a persisté et je suis resté les trois mois prescrits par la loi. J’ai ensuite repris mes fonctions puisque rien ne s’opposait à cela.
Quand feue Thiéo Cissé Doukouré m’a convoqué chez le Président Abdoulaye Wade pour que je démissionne de la présidence du Conseil régional de Matam, j’ai juré au Président que si la Cour d’Appel confirme la condamnation, je démissionne sans qu’on me le demande. Mais pour le moment je ne démissionne pas parce que c’est suspensif. Ce jugement a été annulé par la Cour d’Appel qui m’a relaxé des poursuites de corruption de fonctionnaire et prise illégale d’intérêts. Ces décisions ont été prises en juillet et septembre 2004. Il y a eu deux procédures : pénale et administrative. Ces affaires sont liées bien sûr au dossier de la Sapco.
La Cour des comptes m’avait condamné à une amende de 5 millions francs Cfa, mais non à une amende privative. Le Conseil d’Etat toute section réunie a cassé la décision de la Chambre disciplinaire de la Cour des comptes. C’était en 2008. On m’a totalement blanchi en civil et en pénal dans cette affaire de la Sapco qu’on m’a collée sur la peau. Je tiens à ce que l’opinion le sache une bonne fois pour toutes et lève les amalgames.
REPUTATION DE DETOURNEUR PUBLIC
Vous avez raison de parler de réputation de détourneur. J’ai des adversaires publics et je ne communique pas. (…) On m’a relevé de la direction de la Sotrac après seulement onze mois parce que j’ai refusé la facilité. Quand je suis arrivé à la tête de cette société qui avait un déficit d’un milliard 128 millions F Cfa, j’avais un plan de redressement et j’ai supprimé beaucoup d’avantages comme les cartes gratuits de transport, les recrutements de complaisance entre autres… (…).
A cette époque, les recettes du réseau sont passées de 9 à 19 millions par jour. On m’a relevé parce que j’ai organisé un concours pour le recrutement d’agents de contrôle, de receveurs et de chauffeurs. On m’a présenté des listes. Ils ont échoué tous au concours. Les syndicalistes affiliés à la Cnts ont voulu prendre les bus gratuitement. J’ai dit non et je leur ai demandé de payer. J’ai refusé de faire des cartes de transport gratuites pour casser une grève des élèves. On m’a relevé et je suis resté trois ans sans bureau et sans fonctions.
On m’a fait la guerre parce que je ne faisais pas de politique. Alassane Dialy Ndiaye (ministre des Transports) peut en témoigner. Il m’a appelé pour me dire que j’ai été relevé de mes fonctions mais en me disant que tu «es un excellent gestionnaire. Mais ce n’est pas suffisant parce que tu ne fais pas de politique. Je t’avais dit que tu vas payer». Après ces évènements, je suis resté trois ans chez moi avant d’être nommé en 1993 Directeur général de la Sapco.
GESTION DE LA SAPCO
Quand je suis arrivé, c’était une société en faillite, les travailleurs sont restés cinq mois sans salaire. Personnellement, je suis resté trois mois sans salaire. C’est Tidiane Sylla (ministre du Tourisme) qui m’a prêté une vieille 404 parce qu’il n’y avait pas de véhicule de fonction. Tout le mobilier de bureau de la Sapco était vendu aux enchères par la Bicis. En quatre mois, j’ai redressé la Sapco qui est devenue très viable. J’ai rattrapé tous les salaires, j’ai déménagé la direction de la rue Blanchot à la rue Carno. A la Sapco, je me suis attaqué à des mauvais payeurs qui louaient ses terrains. Je me suis attaqué à un puissant groupe français : le Savana. Il ne payait pas le loyer de la Sapco et il ne payait pas à l’Etat. Je les ai traînés en justice pour qu’ils paient. En février 1998, la Sapco n’était pas inscrite sur le tableau de contrôle de la Commission de vérification. On a dépêché une mission spéciale pour me débarquer. Parce que j’ai emmerdé le groupe Savana pour qu’il paye. Je les ai traduits devant le Tribunal et ils ont été condamnés à Thiès. Ils ont fait appel à Dakar et on m’a même condamné moi. Demandez à Me Aïssata Tall Sall et Me Frank Zeïtoun, ils connaissent tout ce qui s’est passé.
De 94 à 98 j’ai eu des primes de rendement offertes par le président de la République. Cela veut dire que j’ai bien géré. Les comptes, c’est un commissaire aux comptes qui les certifie, c’est le contrôle financier de la Présidence qui les supervise, qui analyse pour le compte du président de la République. Ils ne peuvent pas dire au Président qu’il y a une mauvaise gestion à la Sapco et qu’on me donne des primes de rendement avec le personnel. Sur ce dossier Sapco, je veux que les gens retiennent que Adama Sall n’a absolument rien fait. Malgré cela il a été traîné en justice, Dic, juge d’instruction, tribunal de première instance, Cour d’Appel.
Les gens continuent de parler de la Sapco, de mauvaise gestion. C’est faux. A la Sapco j’ai redressé, j’ai eu des primes de rendement pour tous les exercices comptables.
COMPLOT DE LA PRIMATURE DE L’EPOQUE
Je ne peux citer de nom. Je sais que j’ai été victime de complot. C’était la Primature qui a précédé celle de Mamadou Lamine Loum (NDLR : Habib Thiam était à l’époque Premier ministre). On m’a envoyé une mission spéciale composée de cinq Français et un Sénégalais comme chef de mission. Ils ont tout contrôlé. Ils m’ont félicité et m’ont demandé d’aller à Saly pour vérifier encore. Le chef de mission m’a demandé de lui prêter un véhicule parce que sa voiture est en panne. Je lui ai donné 50 litres de carburant et je lui ai offert un agenda de la Sapco qu’il m’avait demandé. Après, il a sorti un rapport pour dire que j’ai essayé de le corrompre. Une semaine après le ministre Tidiane Sylla m’appelle pour me demander de venir dare-dare. Il me dit : «J’ai reçu une lettre du président de la République qui vous relève de vos fonctions. On a dit que vous avez essayé de corrompre le Commissaire.» Malheureusement, il avait laissé son ordre de mission sur la table sur lequel il est écrit «il utilise son véhicule personnel». Il m’a demandé et je lui ai offert du carburant. J’ai écrit une note adressée au président Abdou Diouf accompagnée de l’ordre de mission. Le président de la République a annulé la décision. C’était en février 1998. En clair, le rapport de la Cour des comptes a été utilisé pour me nuire. Je l’affirme et je le réitère. On a instrumentalisé la Cour des comptes pour me nuire. J’ai été la première personne à être entendue par la Dic après l’Alternance. On m’a convoqué sur la base de ce rapport et non les audits.
On m’a nommé directeur général du Cices, on ne m’a pas relevé de la Sapco. Le Cices est plus important que la Sapco. Demandez au ministre du Travail de l’époque, Khalifa Sall, il y avait plus de 100 candidats mais le Président Abdou Diouf avait dit : «Tu as bien travaillé à la Sapco mais il faut que tu ailles continuer ce travail au Cices qui est très important.»
RAPPORT DE LA COUR DES COMPTES DE 1999-2000
Quand je suis allé au Cices, ils sont revenus derrière moi. Ils ont fabriqué un rapport avec 52 accusations. Tout est là (il montre un document). Mais le plus évident ils ont parlé d’une dame qui était venue acheter un terrain à Saly. La dame a soutenu qu’elle a remis l’argent au directeur technique, Feu Saliou Ndiaye une somme de 2 millions francs Cfa. Or le terrain coutait 1,2 million francs Cfa. Moi, je n’ai signé que le bail mais je n’ai pas reçu l’argent. Eux (les enquêteurs), ont dit sur simple parole que Saliou Ndiaye m’a remis cet argent. Je n’ai même pas vu cette dame. Elle a été reçue par le directeur juridique qui est chargé de faire les contrats qui a son tour doit régler ce problème avec la comptabilité. C’est après cela qu’on m’amène le bail pour le signer. Mais le gars a eu peur et ils lui ont dit de dire que c’est à moi qu’il a remis l’argent. Mais Dieu est très fort et très puissant…
Oumar Khassimou Dia m’a appelé avec d’autres responsables politiques de Matam à la chute de Diouf pour adhérer à l’Afp, il m’a dit : «Adama Sall si tu ne viens pas, tu iras en prison parce que le rapport est sur la table de Moustapha Niasse.» Je lui ai dit (en hal pular et en wolof) «je m’interdis de militer à l’Afp». Si vous pouvez me condamner sur la base de ce rapport, on y va. Une semaine après, on me convoque à la Dic en avril 2000, de 16 à 21 heures. Le commissaire Latyr Diouf avec 4 inspecteurs m’ont posé toutes les questions possibles. Sur ce problème, heureusement qu’il y avait une facture. Ils ont appelé à l’adresse sur la facture en France pour une facture proformat et c’était exactement le prix. Ils ont su que je suis de bonne foi. A 21 heures, ils sont allés voir le procureur Diagne et après ils sont venus me dire qu’ils n’ont pas d’éléments pour me déférer. Je lui ai dit «(Citation coranique)…Ce n’est pas possible. Je ne ferai jamais quelque chose pour être condamné. Jamais». Alors ils m’ont pris mon passeport en me disant que tu ne peux pas voyager. Ils ont enquêté, enquêté, enquêté pendant presque trois mois avant de faire un rapport au juge d’instruction qui à son tour, a enquêté, enquêté, finalement il a envoyé au Tribunal de première instance conclusion : relaxe purement et simplement du délit de détournement de denier public, de faux et usage de faux. Ils ont retenu deux choses : prise illégale d’intérêt et corruption de fonctionnaire pour les 50 litres de carburant que j’ai donné à l’enquêteur et que j’ai reconnu.
RAPPORT COUR DES cOMPTES, UN DOSSIER FABRIQUE ?
Je jure que c’est pour me nuire. Parce qu’il n’était pas prévu que la Sapco soit contrôlée en 1998. Elle ne figure pas dans le tableau de contrôle. C’est une mission spéciale qui a été envoyée à l’improviste pour me nuire parce que j’ai attaqué un groupe puissant, le groupe Savana. Il y a des Sénégalais là-dedans. Je n’incrimine pas seulement les Français.
La Cour des comptes a fait un rapport de 52 accusations. La Primature de l’époque l’a envoyé le 29 décembre 1999, le président Abou Diouf approuve et l’envoie au Premier ministre Mamadou Lamine Loum. Ils ont dit Adama Sall fait de la politique, il a une base électorale, attendons après les élections pour «lui faire la peau».
CERTITUDES
Un contrôle quand il veut te nuire, tu ne peux pas échapper. J’étais contrôleur d’Etat. Je peux les enseigner, personne d’entre eux n’a les diplômes encore moins l’expérience que j’ai. Pour contrôler, il faut avoir géré d’abord.
Ils (La Cour des comptes) ont refusé de publier ma réponse. Ils n’osent pas publier ma réponse et ne m’ont servi aucun motif. Tout ce qu’ils ont dit ce sont des mensonges et je les ai battus en brèche. Moi je suis pour l’autonomie des corps de contrôle et je l’ai écrit. (…)
Je n’avais pas voulu prendre d’avocat au départ. J’étais seul et c’est vers la fin de la procédure que Me Wane et Me Malick Sall sont venus. Donc on a fait appel et mon avocat a demandé au chef de la mission Amadou Arame Diagne : «Quand Adama Sall t’a remis les 50 litres de carburant est-ce qu’il t’a demandé une faveur ?» Il a dit que je ne lui ai rien demandé et mon avocat a signifié au président (du Tribunal) que pour qu’il y ait corruption, il faut qu’il y ait échange. Voilà ce qui m’a sauvé. Alors le Tribunal a totalement infirmé le premier jugement.
CONTENTIEUX AVEC IFRA NIANG
C’est le dossier sur les crédits de contrepartie. Quand votre confrère de Weekend magazine est venu me voir pour m’en parler, je lui ai dit que je ne connais pas ce problème et j’ai appelé le Sage Niang pour lui dire qu’il y a un journaliste qui a révélé des choses graves qui relèvent de votre gestion. Après la publication de l’article, je lui ai donné une demande d’explication, ensuite j’ai fait une note au Premier ministre de l’époque Hadjibou Soumaré et j’ai saisi la Direction générale de la sûreté nationale pour enquête (il montre la demande d’explication, la réponse du mis en cause, la note au Pm et des coupures de presse Ministère de l’Hydraulique : Mic Mac autour de Adama Sall). (…) Je ne connais pas la suite du dossier. Il est toujours en détention préventive. Je l’avais pourtant mis en garde en lui disant que quand je lui dis d’exécuter quelque chose sans l’écrire de ne pas le faire. Après l’affaire, je lui ai servi une demande d’explication. Mais, il n’a pas été convaincant, j’ai ensuite saisi le Premier ministre (Aguibou Soumaré).
Aucune faute de gestion ne peut être mise sur la tête d’un ministre à moins qu’il y ait un ordre écrit. L’Administration ce sont des écrits. Un fonctionnaire de la hiérarchie A ou un agent de l’Administration ne doit accepter aucune décision verbale de l’autorité. Moi je ne l’accepterai jamais. Donc ce que je n’accepte pas de l’autorité, je ne l’impose pas aux autres.
SILENCE COUPABLE
Je n’ai jamais voulu communiquer sur ces affaires. Je reconnais que c’est de ma faute. C’est vrai que je n’ai jamais voulu démentir la presse. J’ai toujours cru que ces décisions sont publiques. Si on m’avait contacté sur ces affaires, je serais directement venu vers vous pour donner la bonne information.
Je n’ai jamais détourné de deniers publics de ma vie. Vous croyez que le président de la République et le Premier ministre vont me confier un poste ministériel sur le coup d’une condamnation. Je l’aurais refus !
En septembre 2003, le Premier ministre d’alors Idrissa Seck m’avait contacté pour me dire que le président de la République voulait nommer ministre des Sénégalais de l’extérieur. Je lui ai répondu : «Dites au chef de l’Etat que je ne peux pas entrer dans le gouvernement parce que j’ai un dossier pendant en appel… Ça risque de ternir l’image du régime.» Il m’a remercié et félicité. Je lui ai proposé de nommer Abdou Malal Diop (actuel ambassadeur du Sénégal au Gabon) à ma place. Je ne ferai jamais de choses qui sont contraires à la loi (Sic).
LOTISSEMENT DE DIAMALAYE
D’abord le ministre de l’Urbanisme ne donne pas de terrain. A Diamalaye, c’est une personne agissant pour le compte de la famille Talla Diagne qui m’a adressé cette lettre-là le 20 décembre 2008 (il brandit la lettre) pour demander un accord préalable pour le lotissement d’un terrain à Diamalaye faisant l’objet d’une réquisition du 5 avril 1951 (il lit les détails). J’ai imputé au Directeur de l’Urbanisme qui lui a adressé une lettre le 20 janvier pour lui indiquer qu’on ne peut pas autoriser et qu’il complète son dossier avec un titre de propriété. Il est revenu le 27 août 2011 en produisant une ordonnance du Tribunal qui l’autorise à jouir du terrain (il lit les détails de l’ordonnance)…
Je n’ai jamais donné une autorisation de construire. Vous ne verrez jamais un arrêté portant autorisation de construire à Diamalaye et les arrêtés sont numérotés à la Primature. Même dans le procès-verbal de passation de service, vous ne verrez jamais Diamalaye dans les dossiers de lotissement.
Les gens, encore une fois ont voulu me nuire. Je les connais mais je les laisse avec Dieu qui est le plus Grand Juge. Et Dieu nous a jugés. Où sont-ils maintenant ? Ils étaient dans le gouvernement et faisaient la pluie et le beau temps… C’est qui ? Ils se connaîtront. (…) Il y avait beaucoup de problèmes de succession autour du Président, des tiraillements. Chacun veut succéder au Président. Ils veulent hériter du Président avant sa mort…
EMISSAIRE DE CAMBERENE
En avril 2009, après les élections locales, j’étais le seul à avoir gagné et mon centre de vote, mon village et ma communauté rurale. D’autres ont perdu leur village, d’autres leur collectivité locale. Mais à la formation du gouvernement, on m’a sorti et on a mis d’autres qui avaient perdu. J’ai écrit au président de la République pour le remercier. Six mois après, il m’a rappelé en disant «Adama Sall, ce qu’on t’a fait ce n’est pas normal, on t’a fait du tort… Je vais te ramener aujourd’hui». Je continue à travailler parce que j’avais déjà construit le ministère de l’Hydraulique qui n’existait pas. Il me donne l’Assainissement et l’Hygiène Publique que j’ai commencé à construire. En juin 2010, il m’ajoute l’Urbanisme. En septembre 2011, alors qu’il était en vacance à Tanger, les gens lui présentent ce dossier de Diamalaye. Pire, ils lui disent que j’ai signé avec une entreprise espagnole qui a gagné le marché de Cambérène et qu’elle me donne 15%. Un marché qui fait 7 milliards. Ça devait me rapporter un milliard 50 millions. Le Président me dégomme tout de suite, sans même m’entendre et de l’étranger. Voilà. Je ne dis rien. Alors on reste comme ça jusqu’au 7 décembre 2011. Il devait aller à Matam, le 10. Il m’appelle, je viens. «Adama Sall, on m’a dit que tu as fait ceci, tu as fait cela.» Je dis : «Président même si on vous avez dit que j’avais tué quelqu’un avant de me condamner, attendez votre retour pour me demander, je vous donne des explications ou appelez-moi à Tanger… vous me condamnez, si mes explications ne sont pas suffisantes.»
Voici le dossier de l’émissaire de Cambérène (il sort une autre chemise de documents). Ordonnateur de dépenses, administrateur section financement de 11 millions d’euros (7, 480 milliards), financement Union Européenne, administrateur de crédit, directeur de la dette et des investissements, ordonnateur des dépenses Ddi, président de la commission des marchés Ddi, maître d’ouvrage Ddi, maître d’œuvre Onas. Je ne signe même pas. Voilà ceux qui ont signé le marché : Gilles Hevio, chef délégation de l’Union Européenne, Mamadou Faye, directeur de la Ddi, Amadou Lamine Dieng, Dg de l’Onas. Je n’ai même pas vu ce marché, ni le dossier d’appel d’offres. Mon cabinet n’est même pas membre. La copie du marché est là. Voilà les signataires. Vous ne verrez jamais la signature de Adama Sall, ministre de l’Assainissement. J’ai dis au Président : «Mieux, le 27 juillet 2011, quand on a parlé de l’Assainissement, je vous ai dit dans mon budget il est inscrit 17 milliards pour l’assainissement urbain. Je n’administre aucun franc, aucun crédit. C’est le ministre des Finances qui administre, qui ordonne.»
COMPAGNONNAGE ET LES 30 MILLIONS DU PRESIDENT WADE
Nous étions dix responsables. Au premier tour, nous sommes allés voir Pape Diop, président du Sénat, il nous a donné 30 millions pour la campagne pour le premier tour, pour les dix responsables. Nous avons fait la campagne et nous avons gagné au premier tour. Au deuxième tour je ne suis même pas allé les voir. Les gens ont fait la confusion. Comment je peux prendre l’argent du Président Abdoulaye Wade et ne pas faire campagne pour lui. Je ne le ferai jamais parce que je ne veux pas avoir la tête baissée devant eux. Jamais. Ça, c’est de la lâcheté.
Je ne suis pas allé voir Abdoulaye Wade. C’est lui qui m’a appelé le 14 juillet 2000 pour me demander de venir le 15 juillet au Palais pour parler politique. Je suis allé avec des gens et il m’a dit qu’il veut des cadres pour travailler le Sénégal. «J’ai vu ton Cv et ton parcours, je veux travailler avec toi pour construire le Sénégal et aussi sur le plan politique que tu t’engages à mes côtés.» Je lui ai répondu que je suis un agent de l’Etat et je suis à votre disposition, mais sur le plan politique je lui ai dit que je peux vous garantir le vote de Matam à condition que vous fassiez quatre choses : 1- faire de Matam une région. On est fatigué d’aller jusqu’à Saint-Louis pour un casier judiciaire qui coûte 200 francs et de payer 15 ou 20 000 francs. 2- la route Linguère Matam, 3- l’exploitation des phosphates de Ndendory, 4- le désenclavement du Dandé Maayo.
EXCLUSION DU PDS ?
Ils m’ont chassé du Pds. Pourquoi ? Je suis un responsable politique qui a toujours gagné sa base. A cinq mois de la Présidentielle, on me sort du gouvernement. On a ignoré que j’ai une base, on m’a sorti du gouvernement et on a désigné Diakaria Diaw comme responsable des élections, mandataire pour le département de Kanel. Et comme, il nous a exclu, aucun de mes militants n’a été dans un bureau de vote pour représenter le parti. Moi-même, en tant que responsable, je n’avais pas de carte de mandataire. Ils nous ont exclus de fait.
Mais avant cela, quand j’ai perdu mon grand frère, Macky Sall est venu me présenter ses condoléances. On a parlé politique. Je lui ai dit : il y a un problème, je ne peux pas venir au premier tour, mais je peux te dire que Abdoulaye Wade ne sera pas élu au premier tour.
SOUTIEN A MACKY SALL
Je n’ai jamais appelé Macky Sall. Il ne m’a pas non plus appelé, mais il m’a envoyé Farba Ngom (griot du Président élu). Il m’a dit : «Macky vous attend.» Je ne l’ai jamais rencontré même si je l’ai rejoint. Je le soutiens sans conditions. Je lui ai envoyé juste un Sms pour le féliciter. Je ne suis pas parti là-bas pour fuir des poursuites judicaires comme le pensent certains. Quelles poursuites ? Un ministre ne gère pas de l’argent pour être poursuivi. Je n’ai rien à me reprocher parce que j’ai été totalement blanchi par la Justice. Je ne suis jamais allé voir le Président Wade, c’est lui qui m’a appelé parce que je n’avais pas de grades politiques au Parti socialiste. Je ne suis pas transhumant. Il m’a sollicité et je suis parti le rejoindre. Désormais, je suis membre à part entière de l’Apr.
ADAMA SALL, UN BOUHABA MYSTIQUE
(Rires) Je crois en Dieu. Je prie régulièrement. J’essaie d’être un croyant. Je ne souhaite le malheur à personne. Je le jure. Mais je prie Dieu pour qu’Il me protège de mes ennemis. Et Lui le dit : «Si on veut t’humilier, Je suis Ton défenseur, Ton avocat.» Quand tu crois en Dieu personne ne peut t’atteindre. Croire en Dieu n’est pas facile. Moi je crois en Dieu. Je le jure.»