Le mois béni de Ramadan rime souvent avec changement de port vestimentaire pour les jeunes sénégalaises. Pour autant, le côté sexy des filles demeure, puisque certaines d’entre elles restent, en dépit des tenues traditionnelles qu’elles arborent, en mode «Pathial» par exemple.

Changer de port vestimentaire durant le Ramadan est devenu une habitude chez beaucoup de jeunes sénégalaises. Cependant, si certains tentent de soigner leur habillement durant ce mois béni chez les musulmans, d’autres par contre continuent avec leurs vieilles habitudes. Elles sont toujours en mode sexy, ce, même si elles sont en tenues traditionnelles. C’est du moins le constat qui a été fait au centre ville de Dakar et dans bien des quartiers de sa périphérie. Certes les pantelons «slims», les bodys, les dos nus, les jupes courtes ou encore «culottes courtes» sont bien rangés au fond des armoires, mais les jeunes filles restent toujours sexy.

En cette matinée du jeudi, l’arrêt de bus devant l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, presque toutes les filles sont bien habillées en tenues traditionnelles, avec des robes longues, des châles avec une diversité de tissu. Mais une d’entre elles attire l’attention de plus d’un. En turban rouge, cette jeune fille de taille moyenne, peau dépigmentée, sac bien accroché à la main gauche, laisse apparaître tout son corps devant un public nombreux qui guète l’arrivée d’un bus. Non loin d’elle, une autre jeune demoiselle, le visage bien maquillé, avec le gloss qui brille sur ses lèvres, de grosses lunettes aux yeux, est habillée en taille basse wax de couleur marron, avec une jupe en fente, jusqu’aux genoux. Sa taille basse ne cache presque pas sa poitrine. Elle est en mode «panthial» et offre son «balcon» généreux en spectacle aux jeunes hommes présents en ce lieu.

Même les «voilées» suivent la tendance. Et ce ne sont pas les deux jeunes filles rencontrées à l’intérieur de l’université qui diront le contraire. Cure-dent dans la bouche, ces deux «Ibadous», trouvées en train de réviser au niveau du jardin de l’université ne cachent pratiquement rien. Elles sont habillées en robe voile fleurette, avec une devanture décollée, qui met bien en valeur leurs poitrines.

Après l’université, cap sur le rond-point Jet d’eau. Là aussi, un instant d’observation permet de constater que plus d’une jeune fille qui passe est habillée «sexy», bien qu’en mode Ramadan, avec des tenues traditionnelles. Des habits qui font jaser dans la mesure où ils laissent transparente la forme physique des uns et autres, principalement au niveau du buste et de la poitrine avec ces décolletés mode «pathial» qui laissent découvrir des pairs de seins très largement mis en valeur, à dessein, pour attirer les regards.

Dans ce lot, c’est cette jeune fille d’à peine 20 ans, à la tête «ornée» par un greffage cheveux long noir beige, un gros sac à la main, une grosse montre au poigné, la taille élancée, le teint clair, qui captive le plus notre attention. Avec sa jupe taille haute en wax jaune bleu, bordée une longue traîne qui balaie la rue, une jupe dont l’avant laisse apparaître une fente jusqu’aux genoux, avec un nœud au bout, elle arbore un body débardeur de couleur rouge qui met en valeur sa poitrine particulière généreuse, le tout sur fond d’un décolleté plongeant à faire perdre le nord à un «Ayatola».

Telle est la mode Ramadan, version tenues traditionnelles, déclinaison «pathial», des jeunes sénégalaises en ce mois béni où tous les pèchés doivent normalement être mis en hibernation.

Les filles se réfugient derrière la chaleur pour justifier leurs tenues sexy en style «pathial»…

La chaleur, c’est l’argument avancé par les jeunes filles que nous avons apostrophées pour justifier leurs tenues traditionnelles sexy, même durant ce mois de Ramadan. Ramatoulaye Diagne est une caissière dans une banque de la place. Avec une belle rondelle, elle est habillée en robe taille basse jaune-or, au devant découpé en bateau. Le visage bien maquillé, la poitrine en mode «pathial», elle dit : «Nous sommes obligées de nous habiller de façon assez légère parce qu’il fait extrêmement chaud en ce moment. Et je ne crois pas que ceci est sexy, du moment que c’est long. Pour ce qui est de la poitrine, je trouve qu’il n’y a rien de méchant à cette coupe. C’est juste à cause de la chaleur».

Sous une robe en voile de couleur verte, assortie d’un bas, Aminata, étudiante en deuxième année en géographie, soutient que «même si c’est sexy, ce ne sont pas des habits courts. La chaleur a quelque chose à voir avec cette tenue. Non seulement il fait chaud, mais avec les cours, les va-et-vient, nous ne pouvons que s’habiller de la sorte. C’est à dire très relaxe».

Alimatou Sall, pour sa part, ne cache pas toute sa surprise face aux nombreuses critiques dont les jeunes filles font l’objet. «Je ne comprends plus les Sénégalais. Youssou Ndour avait raison de dire qu’il est difficile de satisfaire les gens dans ce pays. Même quand nous sommes en tenue traditionnelle, il faut que les gens trouvent le moyen d’y mettre un petit grain de sable pour critiquer. On ne peut pas avoir faim et porter des habits qui nous fatiguent, surtout avec cette chaleur d’étuve. On est obligé de porter des tenues biens aérées pour faire face aux rigueurs du climat. Voilà, c’est tout», martèle-t-elle.

Dans la même foulée, une autre jeune fille, préférant garder l’anonymat, est d’avis qu’«il ne sert à rien de râler à cause des habits que nous portons. Les gens qui disent que les filles sont sexy même en période de Ramadan, nous ont bien observées. Ce qui est important, c’est de jeûner et demander pardon au bon Dieu. L’habillement ne reflète pas la personnalité d’une fille et ne gâche aussi en rien le jeûne de qui que ce soi». Pour cette étudiante à l’Université Dakar-Bourguiba, le débat est biaisé. «Le fait qu’on s’habille en tenue traditionnelle, même si c’est sexy, mérite des encouragements. Si on s’habillait avec des culottes courtes, des minis jupes et autres durant le Ramadan, j’aurais pu comprendre ces critiques. Mais là, ce sont des robes longues, des tailles basses, des turbans… vraiment je ne comprends pas les gens et leurs commentaires désobligeants», dit-elle.

«Le problème avec les décolletés ‘pathial’, c’est qu’ils gênent les voyeurs. Parce qu’en réalité, c’est ceux-là qui lorgnent les poitrines des jeunes filles, même pendant le Ramadan, donc les obsédé, c’est eux qui parlent. Ils profitent du paysage et derrière, il se met à critiquer et dénoncer. C’est simplement de l’hypocrisie tout ça», assène-t-elle.

…Les hommes partagés sur la question

«Si les filles croient que Dieu n’existe qu’en période de Ramadan, elles se trompent lourdement», a d’emblée déclaré Fallou Cissé, étudiant en Licence au département d’Arabe de l’université Cheikh Anta Diop. Y allant avec ses versets du saint Coran, l’étudiant arabisant n’a pas manqué de faire savoir que «tout ce que les jeunes filles font en cette période n’est que de la mascarade. Car leurs tenues traditionnelles sont aussi sexy que les autres habits. Elle pouvait au moins porter des habits décents par respect à ce mois».

N’arrivant pas à cerner l’accoutrement des Sénégalaises qu’il juge «sexy et provocateur», Ndiaye Sall Diop est même allé jusqu’à se demander si les jeunes disposent de toutes leurs facultés mentales. «Est-ce que ces jeunes sont normales ? Sinon, comment expliquer leur attitude ? Car elles se moquent à longueur de journée de notre religion à la limite. Pour elle, la religion ce sont des blagues», crie-t-il, haut et fort.

Habib Fall, mécanicien de son état, n’y va pas par quatre chemins pour donner son avis sur la question : «Je ne comprends pas nos sœurs. Elles pensent que la religion c’est le Ramadan et les vendredis. C’est de l’hypocrisie et c’est ce que la religion ne veut pas. Ce qui me choque le plus, c’est leur soi-disant tenues traditionnelles. Elles disent être en tenue traditionnelle le temps d’un mois. Mais, il s’agit de quelle tenue traditionnelle ? Leurs habits sont toujours aussi sexy qu’avant. Toutes les parties intimes de leur du corps sont visibles, c’est haram».

«Les femmes sont des Satan. C’est difficile de les résister en période normale, mais c’est encore pire au mois de Ramadan. Elles sont toujours aussi sexy, c’est difficile de jeûner au Sénégal», ajoute Libasse, un jeune cadre dans une banque de la place. Il se demande d’ailleurs «si le bon Dieu va accepter notre jeûne, nous les hommes qui voyons à longueur de journée des filles qui exposent toutes leurs rondeurs, leur anatomie et leur poitrine».

Même son de cloche chez Mamadou Diop, un jeune apprenti «Car Rapide». «Nous les apprentis, on est exposé toute la journée à la provocation des jeunes filles avec leur ‘pathial’ qui exposent leurs seins à notre regard. Et je vous jure que tous les hommes ne sont pas pareils. Même un simple maquillage peut susciter des frissons, à plus forte raison un habillement sexy, de surcroît s’il s’agit d’une tenue traditionnelle. Elles sont dangereuses les filles. Il est tant que les imams posent des actes forts pour que ces filles qui empêchent les gens de bien jeûner reviennent à l’orthodoxie», suggère-t-il.

Mais cette position consistant à condamner les jeunes filles et leur porte vestimentaire sexy sur fond de «pathial», tous les hommes ne la partagent pas. Ainsi, pour Tapha Diouf, vendeur de cure-dents, «une personne doit éduquer son corps, ce, même si une fille se présente nue devant elle. Je n’ai rien vu d’anormal dans l’habillement de ces jeunes filles que je croise à longueur de journée dans les rues de Dakar. On doit les laisser tranquilles ou les encourager à être plus correctes, surtout durant le Ramadan. Mais le ‘pathial’, il dérange qui ? Certainement celui qui a de mauvaises pensées et qui ne sait pas se contrôler. Un homme pieux, un homme qui se sait se tenir, ce n’est pas la vue d’une poitrine généreuse, même avec un décolleté d’une jeune fille, aussi belle soit-elle, qui va le faire craquer. D’autant qu’on dit d’un homme qui jeûne qu’il doit être réservé et éviter la médisance. Alors, gardons-nous de porter des jugements sur les filles. Parce qu’elles aussi jeûnent comme nous».

Malick, étudiant en Master de sociologie à l’Ucad, fait lui savoir que «tous ces hommes qui crient de gauche à droite au scandale sont en réalité intéressés par le port vestimentaire des filles. Et cela, malgré le Ramadan. C’est tous des voyeurs qui épient les jeunes filles pour voler du plaisir en lorgnant leur corps pour satisfaire leurs envies. Faites un tour après la rupture dans les jardins de l’université, vous allez-vous en rendre compte. Qui cherche, trouve. Il y a des hommes qui n’aiment pas voir leur copine en tenue traditionnelle. Les filles n’ont rien fait de mal, la faute incombe aux hommes qui aiment ça et qui en jouissent en faisant croire le contraire. Maintenant, le reste, ce sont des histoires. Ramadan où pas, chacun pratique sa religion et vit sa foi comme il la sent».

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