Les prochaines élections locales de 2014 ne devraient consacrer, dans le Djoloff tout entier, que des coalitions programmatiques. Et cela devrait être la conséquence directe d’une évidence trop criarde : des indépendances à nos jours, toutes les bannières politiques, tous les leaders de quelque obédience qu’ils fussent, ont échoué à porter les aspirations de cette contrée parmi les préoccupations de l’Etat central.
Le même échec a couronné leurs actions à la tête des différentes collectivités locales, depuis que la décentralisation a été mise en œuvre. Pour illustrer ces échecs complets, regardons l’état des lieux : après 50 ans d’indépendance, la contrée toute entière ne dispose d’aucun établissement d’enseignement supérieur, d’aucune institution de formation professionnelle. 50 ans après les indépendances, le plus grand centre urbain de cette contrée (la ville de Dahra) ne dispose toujours pas d’un hôpital digne de ce nom et continue donc de référer ses malades ailleurs. Aucun kilomètre de route, hormis la nationale 3 qui s’arrête à Linguère, n’y a été construit. Pis, le prolongement de cet axe entre Linguère et Matam a été utilisé par les 2 premiers Présidents du Sénégal comme un appât pour l’électorat local, une promesse jamais tenue, jusqu’à ce qu’ils quittent le pouvoir. C’est le 3è Chef d’Etat du Sénégal indépendant qui a eu le mérite de démarrer ce projet, seulement dans les années 2000, avant de se raviser, considérant sans doute qu’il a été trop naïf de ne pas profiter de la naïveté des Djoloff-Djoloff, comme ses prédécesseurs. Comble de mépris, dans cette zone d’élevage, ne se retrouve aujourd’hui aucune installation moderne (abattoir, laiterie, tannerie ou autre) valorisant cette activité économique. Le seul CRZ (Centre de Recherches Zootechniques) qui y faisait jadis la fierté de tous a été ravalé par l’Etat socialiste au rang de structure fantôme, vidée de son sens et de sa vitalité. Avant que l’Etat libéral, mû par on ne sait quel dessein, n’aille recréer un « haras national » à Kébémer, ville natale de l’ex-Président de la République. Même après les fanfaronnades d’une certaine « Goana », pas un seul tracteur ne bruit dans la toute la zone, et l’agriculture y est donc demeurée archaïque comme au premier matin.
Donc, trop c’est trop ! Et les Djoloff-Djoloff doivent en être suffisamment conscients, et réagir en conséquence. Ayant donc vu leur vie entière sacrifiée par cette incurie, tous ceux qui y sont nés après les indépendances et qui sont aujourd’hui quinquagénaires, ont juste le temps de se réveiller et de se racheter, afin que leurs propres descendances ne subissent le même sort. Nous n’avons plus le droit de perdre une seule année, à fortiori 5 ans. Les prochains mandats électoraux locaux devront donc être le point de départ d’un profond changement. Et ce sont les politiciens purs et durs qui devront être les premiers à passer à la trappe, pour laisser la place aux personnes ou coalitions porteuses de vision et de programmes véritables de développement.
C’est vrai que la tentation est grande, de faire dans le mimétisme habituel et de vouloir surfer sur la vague de sympathie du Parti nouvellement arrivé au pouvoir (Parti dont je revendique d’ailleurs mon appartenance) et de gagner les élections locales, sans coup férir. On verrait alors échouer à la tête des villes, communautés rurales et conseil régional, des personnes pas forcément capables de changer le destin de ces collectivités, dans le sens aujourd’hui attendu. L’Alliance pour la République (APR) et ses alliés devraient donc renoncer à cette facilité (comme le Président Macky Sall à son mandat de 7 ans), et faire le choix d’offrir à ces collectivités locales, les meilleures chances de s’en sortir. Par civisme et par amour pour cette contrée du Djoloff qui n’a que trop souffert.
Place donc aux programmes de développement, et à rien d’autre ! Et dans cette nouvelle dynamique, le meilleur hommage que les républicains et autres citoyens qui ont élu à 65% le Président Macky Sall peuvent lui rendre, ce sera le génie avec lequel ils vont pouvoir redécliner, au plan local, son programme de développement économique, le « yoonu yokkuté ». En termes plus illustratifs, si le « yoonu yokkuté » était assimilable à une grande route nationale, il a besoin, pour être efficace, d’être raccordé aux plus petits hameaux du Pays, par un système de routes secondaires, de pistes et de sentiers. Et ce travail-là revient aux militants et leaders politiques locaux. Et il représente un bien meilleur gage pour mettre le Président Macky Sall à l’aise, en 2017, au moment de redemander le suffrage des Sénégalais.
« Nul n’entre dans la Cité, s’il n’est porteur d’un programme convaincant »
L’APR et ses alliés devraient donc rester ouverts et fair-play, pour mobiliser le maximum de citoyens et de personnes ressources, de quelques bords qu’ils soient, dans la préparation de programmes de gouvernance qui, partout au Sénégal et dans le Djoloff en particulier, devront être à dominante économique. Ce sont donc de tels programmes qui devront être exposés aux populations, pour leur demander leurs voix dans le cadre des prochaines élections locales. Et comme nous connaissons suffisamment la fâcheuse tendance des candidats, une fois élus, à dévier de leurs promesses, ces programmes de gouvernance devront être encadrés, par la définition de réalisations concrètes à faire à des échéances bien précises. Et que tous les élus (conseillers municipaux, ruraux, régionaux) s’engagent, dès le départ, à barrer la route aux leaders (maires, PCR) dès qu’ils s’écartent de la feuille de route tracée ensemble. Et que les citoyens et la société civile soient aussi expressément préparés à assurer la veille, durant tout le mandat. Que finisse donc le temps où on attend la fin d’un mandat pour sanctionner un élu local véreux, incompétent ou qui a trahi ses promesses. Arrêtons donc de donner des tranches successives de 5 ans de notre vie à des aventuriers politiques ou des prédateurs de biens collectifs.
Parlant de programmes de développement, nous savons déjà que le Djoloff tout entier est une terre en friches, où tout est à faire. Première conséquence : il faut enterrer les querelles de leadership politique qui, depuis 50 ans, nous empêchent d’aller à l’essentiel, c'est-à-dire, une unité forte capable de peser devant l’Etat central et de l’emmener à donner à notre contrée, sa part du développement national. Deuxième conséquence : au-delà de l’unité entre les leaders, il faut une cohérence et une bonne articulation entre les différents programmes de développement à l’échelle de toute la zone. Il faut donc s’accorder sur les doléances et les porter ensemble. De ce point de vue, toutes les localités du Djoloff ayant l’élevage comme dénominateur économique commun, cette activité peut représenter notre base programmatique. Ensuite, viennent les infrastructures, la santé, l’éducation… Des réalisations concrètes dans ces différents domaines doivent être nos exigences face à nos futurs élus locaux, mais aussi face au gouvernement du Sénégal, chacun en ce qui le concerne.
Diéry BA / Coordonnateur du CRADD
Membre de la Coordination des Cadres d l’APR
Email : dieryba@gmail.com