L’Université, depuis quelques temps, est en proie à une violence inouïe. Le Temple du savoir se perd dans l’usage abusif de revendications outrancières, plombant à priori le culte du savoir et de l’excellence. Sa vocation première qui consiste à former l’élite de demain et la mettre au service du développement, s’en trouve galvaudée. Le spectacle auquel nous assistons est déplorable : la violence, l’indiscipline, les déperditions de toutes sortes sont érigées en règle, en mode de fonctionnement de ceux sur qui repose l’avenir de toute une nation, de tout un continent.

L’Université doit être le lieu par excellence des libertés, mais les actes de vandalisme et de destruction de biens appartenant à autrui, s’inscrivent en porte à faux avec ce même principe démocratique garantissant l’équilibre, la sécurité de tous les citoyens. Or, la liberté n’est possible qu’à la condition d’être limitée par la loi juridique. D’où la nécessité et l’importance des « franchises universitaires »  dont se servent les étudiants, comme bouclier protecteur. 

La question qui se pose est la suivante : Faut –il opposer la liberté à la liberté ou aux libertés ?  Etant entendu que c’est la loi qui permet aux libertés de cohabiter et non pas de  se détruire mutuellement.  C’est dans ce sens que Rousseau, dans Le Contrat Social  écrit   que dans un Etat de droit, « L’obéissance à la loi que l’on s’est prescrite, est liberté. » Alors, il est impératif , par une démarche participative et inclusive, reposant sur une exigence d’autonomie, de responsabilité, de transparence, et d’éthique dans la gestion des ressources et des hommes, que tous les acteurs de l’Université, puissent faire de l’acquisition du Savoir  et de l’expression des libertés, la seule primauté qui vaille pour circonscrire cette crise.

La  critique dirigée en l’encontre des forces de l’ordre, et par extension, à l’Etat, n’est  que de la chimère, de la part de ceux qui veulent jeter de l’huile sur le feu par des déclarations incendiaires, dans l’espoir de maintenir la confusion, à l’approche des élections locales. L’Université a toujours vécu de pareilles périodes de perturbations, depuis les années 80 (quatre-vingt), années des politiques d’ajustement structurel et du dépérissement progressif de l’Etat providence, les pays débiteurs ou en voie de développement étaient astreints à une politique de privatisation du service public et assujettis à des réformes institutionnelles, passage obligé pour prétendre à une aide et à un rééchelonnement de la dette. Elle a toujours souffert de ces politiques aiguillonnées par l’octroi d’aides de la part des bailleurs tels que le FMI (fonds monétaire international) ou la banque mondiale

Les partis politiques, pour des raisons diverses et variées, investissent cette espace du savoir, dans le but de s’en servir à dessein en créant parfois de manière systématique des crises qui rejaillissent dans le landerneau politique et ternissent par effet de contagion l’activité politique, étatique et même gouvernementale. Beaucoup d’étudiants ont  connu des échecs répétitifs tributaires de l’intensité du politique dans le milieu universitaire. Les grèves cycliques, les sessions uniques et l’année blanche de 88 illustrent cet état de fait et qu’au finish, une course à la montre pour sauver l’année universitaire par l’implication d’autres acteurs souvent peu soucieux des intérêts estudiantins et par l’entremise du lobbying maraboutique , s’y joue aux dépens même de la validité des diplômes académiques.

L’attribution des bourses  ne doit se faire que sur la base du critère d’excellence, mais on a assisté avec le régime sortant, populiste à l’envie, vouloir accorder une bourse ou une aide à tous les étudiants. Loin de nous, toute idée de sectarisme ou d’égoïsme, mais il est fâcheux de constater que l’étudiant d’aujourd’hui, adopte de nouveaux référents, l’aventurier, l’arriviste, le gain facile, que sais –je encore ? Les amicales d’étudiants se convertissent en milice, l’espace universitaire est parcellée de chapelles, et le culte de l’intolérance cultivé.  Dans cette période de rareté des ressources, et de la politique de sobriété et de bonne gestion, articulée autour du principe de bonne gouvernance, édictée par l’actuel régime, une fraude massive serait mise à nu par les responsables des Universités, fraude qui s’estimerait à plus de deux milliards sur une période de dix ans. Qui en  est responsable ? Il est fort évident qu’il s’agisse  de ceux qui vocifèrent un peu partout qu’ils ont la clé aux maux qu’ils nous ont légués.

Cette génération d’étudiants vit dans l’illusion de L’Etat providence, de la vision de l’Etat qui peut tout faire et doit tout faire, vision qui leur a été inoculée durant ces dix  dernières années. Or l’Africain du millénaire naissant doit  être   « armé de science jusqu’aux dents » comme l’affirme Cheikh Anta DIOP et en  même temps s’enraciner dans les valeurs africaines et s’ouvrir au progrès. Ce sont des valeurs de démocratie, de tolérance, de justice, d’entraide, de l’honneur…

« Dis- moi quelle jeunesse tu as, je te  dirai quel peuple tu seras. » L’Université a pour mission première de forger l’élite de demain, de la pétrir et de la modeler en fonction des aspirations des populations et exigences du développement. L’Université Cheikh Anta Diop, creuset de l’excellence, nous a  toujours gratifiés  d’hommes bien formés, capables de porter le développement de notre pays, de contribuer au rayonnement de l’Afrique. Beaucoup d’hommes politiques et de chercheurs émérites en sont le produit fini. L’actuel Président Macky Sall en est l’exemple le plus éloquent. Dans un monde de globalisation, il est impératif dans un souci de survie, une fois enclenchées  les réformes structurantes, que l’Etat puisse garder les yeux rivés sur cet objectif salutaire.

L’Université doit rester un lieu de réflexion et de science en perpétuel éveil. Et pour préparer notre jeunesse aux réalités complexes du 21eme  siècle, nous devons ainsi restituer à l’Université les attributs essentiels d’espace de formation, de culture, de civisme, de fraternité et de  citoyenneté. Elle ne doit  pas être un espace de compétition livré au dictat de la mode, de la violence, mais plutôt un champ d’expression intellectuel où les inégalités sociales s’effacent devant le culte de l’excellence.

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