Le covid 19 est-il en train de remettre les compteurs de l’humanité à zéro ?

Pour parler avec Cheikh Hameth Tidiane Sy Al Maktoum, « la terre vidée de son sang », est-elle en train de montrer une nouvelle voie à l’homme ?

J’ai eu un vague à l’âme, quand, en pleine pandémie, j’ai appris que les USA ont testé avec succès un missile hypersonique, cinq fois plus rapide que la vitesse du son.

La première superpuissance militaire au monde, impuissante devant la minuscule armée de la nature, le coronavirus, se gausse d’avoir réussi le lancement d’une arme si destructrice, au moment où l’humanité est en péril.

Curieux destin des peuples ! Quand la superpuissance est attaquée par une minuscule armée de coronavirus, elle invoque la chaleur de l’été comme premier refuge.

Le monde a-t-il compris que la crise du coronavirus a plongé l’humanité dans une guerre jusqu’ici ignorée par les hommes ?

Il ne s’agit ni d’une troisième guerre mondiale, encore moins d’une simple guerre.

Il est question d’une guerre nouvelle, de dimension universelle, couplée de l’annonce d’une mutation des paradigmes qui ont façonné le monde dans lequel nous vivons.

Une guerre affreuse, insaisissable, qui met à nu l’impuissance de l’Etat « protecteur. »

En réalité, le covid- 19 sonne le réveil de l’humanité, qui, jusqu’à maintenant, vivait dans l’illusion.

« Things falling apart !!! » Le monde que nous avons toujours connu est en voie de déconstruction.

Nul mieux que Chateaubriand, dans « Mémoires d’outre-tombe », ne décrit le processus de fin de cycle de l’évolution humaine.

Je le cite : « Le souffle d’un siècle s’affaiblit par degrés et s’éteint dans le silence éternel, à mesure que l’on commence à entendre la respiration d’un autre siècle. »

Le nouveau siècle a déjà commencé. Il prendra ses marques à la fin de la pandémie.

La nouvelle gouvernance des Etats, qui ne disparaîtront pas, sera celle de la peur ou par la peur.

En conséquence, le repli sur soi sera leur premier réflexe.

Une remise en cause sans précèdent des grands ensembles, qui s’affaibliront, sera entamée.

L’ONU, l’UE, l’UA, l’OMC et autres organisations internationales seront quasi paralysées.

La réduction drastique, voire la mauvaise volonté des Etats parties, de respecter leurs engagements financiers pour leur fonctionnement en sera la principale cause.

L’aide au développement va s’éroder et deviendra progressivement un vieux souvenir. De nouvelles barrières commerciales seront érigées. Les voyages d’affaires et le tourisme battront de l’aile. Des compagnies de transport disparaitront.

Un vaste mouvement de retour des émigrés aux pays d’origine sera enclenché.

Les Etats africains, et, de façon générale, les pays en développement seront de plus en plus laissés à eux-mêmes. Ils vont acquérir plus d’indépendance et emprunteront de nouveaux axes de survie, et ensuite de progrès.

Les mouvements terroristes vont s’essouffler, à défaut d’être décimés par le virus, dans leurs lointaines bases, sans assistance médicale.

La fonction de médecin deviendra plus valorisante. Des peuples auront envie d’être gouvernés par des spécialistes de la santé, ces héros d’un genre nouveau.

Apres cette période, quand l’humanité sera plus rassurée pour sa survie, le monde aura conscience que les nations n’ont pas besoin de se faire la guerre inutilement.

Les concepts de « containment », de « dissuasion », « d’équilibre de la terreur » n’auront plus de sens.

En fin, la dénucléarisation du monde sera envisageable, et l’énergie propre sera la principale source d’approvisionnement de la technologie.

Les prémices d’un monde plus sûr et plus solidaire seront posées.

La belle assertion de l’écrivain anglais, Kipling que je cite de mémoire deviendra une réalité : « Cités, trônes et puissances défient le temps, presque aussi longtemps que les fleurs qui meurent tous les jours ; mais comme des boutons bourdonnent pour d’heureux nouveaux hommes, de la terre épuisée et méprisées, renaissent les cités. »

Que Dieu protège le monde du coronavirus et de toutes autres maladies.

Habib Sy Ancien ministre d’Etat du Sénégal.

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