On ne sait si c’est pour leur rigueur dans le commandement ou leur longévité à la tête du corps, toujours est-il que les noms des généraux Waly Faye et Pathé Seck reviennent toujours dans les conversations où ces hommes sont décrits comme étant de valeureux officiers qui ont beaucoup marqué l’histoire de la maréchaussée nationale. Désormais, le général Abdoulaye Fall, ancien Haut commandant de la Gendarmerie, fait partie de ce cercle restreint des grands chefs de ce corps d’élite de nos forces armées nationales. Peut-être pour son courage dans le haut commandement et son intransigeance sur les principes, toujours est-il que, lui aussi, marquera à jamais la maréchaussée. Pour ses innombrables réalisations surtout qu’il liste d’ailleurs dans l’interview qu’il nous a accordée. Après plus de 40 années passées sous l’uniforme, dans l’armée, d’abord, puis dans la gendarmerie, le général de corps d’armée Abdoulaye Fall fait ses adieux ! Et lorsque la musique principale des forces armées fermera le ban pour la dernière fois, histoire de sonner la fin d’une très brillante carrière, ce général sans peur et sans reproche pourra alors rejoindre la vie civile avec le sentiment d’une mission accomplie. Avec loyauté, fidélité, compétence et courage. Courage ? Surtout ! Après avoir fait ses preuves dans différents postes stratégiques de commandement — notamment en casamance durant les années chaudes — et dans les fonctions les plus exigeantes, le désormais ex-« haut-com » va pouvoir faire valoir sa riche expérience et son entregent dans la diplomatie puisqu’il vient d’être nommé ambassadeur au Portugal. Comme son prédécesseur à la tête de la Gendarmerie…
Courage, donc, avons-nous dit. Dans des circonstances parfois très difficiles, et dans des crises socio-politiques ou politico-politiques au cours desquelles se jouait l’avenir de notre pays, le général Abdoulaye Fall a fait preuve de sang-froid, de courage, de ténacité et d’abnégation pour que triomphe et survive la démocratie, l'Etat de droit, la paix sociale, la stabilité politique et la sécurité intérieure de notre pays. Durant toute la période où il a assumé les fonctions de Haut commandant de la gendarmerie, le général Fall avait sa façon de porter une double casquette, celle de chef militaire et de… diplomate de réserve. Il savait allier avec un rare bonheur les capacités de réflexion, de décision et d’action. Et surtout quand il s’agit de dossiers politico-judiciaires où les enquêteurs de la gendarmerie aillaient jusqu’au bout après avoir bénéficié du soutien et de la bénédiction de « Zola » (la rue Emile Zola ou se trouve le siège du Haut-commandement de la maréchaussée). Des affaires sensibles comme celle de l’agression de l’homme politique Talla Sylla, « Le Témoin » en garde beaucoup dans sa banque de secrets. Dans cette affaire sensible, bien que toutes les pistes menaient à la présidence de la République, « Zola » avait laissé faire… En tout cas, le président Wade a plusieurs fois tenté de mettre le général Abdoulaye Fall en retraite anticipée avant de revenir sur ses décisions. Miracle ou main de Dieu ? Une chose est sûre, le Général Abdoulaye Fall est l’un des rares rescapés ou miraculés du régime d’Abdoulaye Wade. Ce qui n’a pas empêché qu’au soir du 25 mars 2012, jour du second tour de la présidentielle, le président Abdoulaye Wade a reconnu et magnifié les qualités humaines, professionnelles et démocratiques de cette haute autorité de la gendarmerie. Par devoir de mémoire, votre hebdo « Le Témoin » profite de cette occasion pour vous révéler que c’est le Général Abdoulaye Fall, et lui seul, qui avait appelé le président Wade pour lui conseiller de féliciter son adversaire dès la tombée des toutes prémières lourdes tendances en ces termes : « Mes respects, Monsieur le Président, bonsoir ! On vient de collecter les premiers résultats à travers le pays par le biais des compagnies et des brigades de gendarmerie. Monsieur le président, les premières tendances ne vous donnent aucune chance de remporter ces élections. Pour nous faciliter la tâche d’assurer la sécurité des personnes et des biens, je vous conseille d’appeler votre adversaire pour le féliciter… » a eu à dire le Général Abdoulaye Fall en sa qualité de Haut commandant de la Gendarmerie et directeur de la Justice militaire au président Abdoulaye Wade. Qui était encore le chef suprême des Armées ! Contre toute attente, le président Abdoulaye Wade avait répondu sans hésitation ceci au patron de la gendarmerie.« Merci Général Fall, je vais le faire rapidement ! » avait-il promis. Aussitôt dit, aussitôt fait ! Car, nous révèle-t-on, quelques minutes après, le président sortant Abdoulaye Wade a appelé son adversaire Macky Sall pour le feliciter. Et en toute grandeur, Me Abdoulaye Wade, très touché par le geste plein de responsabilité du général Abdoulaye Fall, avait tenu à le récompenser une dernière fois. Tenez ! C’est ainsi que, dès le lendemain lundi 26 mars 2012, le président Abdoulaye Wade avait fait convoquer le général Abdoulaye Fall pour l’élever au grade de général de corps d’armée. Une promotion que beaucoup avaient du mal à s’expliquer, surtout venant de la part d’un président déjà battu, mais dont le « Témoin » vous livre aujourd’hui les dessous. L’histoire politique du Sénégal retiendra donc ce geste très courageux du général Abdoulaye Fall qui a épargné à notre pays bien des soubresauts. Doté d’une très forte personnalité et d’un caractère trempé, le général Fall s’en va ! Un autre arrive à la tête de la gendarmerie nationale, le général Mamadou Guèye Faye présenté lui aussi comme un homme plein de qualités. « Le Témoin » lui souhaite plein succès et une excellente carrière diplomatique au général Abdoulaye Fall dont on souhaite qu’il goûtera enfin aux joies d’une vie moins trépidante aux côtés de sa douce épouse, Ndèye Fama Diaw…
PAPE NDIAYE
LE TEMOIN N°1147 – HEBDOMADAIRE SENEGALAIS / DECEMBRE 2013