« Quel modèle d’insertion des jeunes sur le marché du travail face aux risques encourus par les jeunes migrants sénégalais ? » Un sujet majeur au cœur des échanges de la 54ème AG de Caritas Sénégal, qui a pris fin le 14 janvier 2018, à Thiès. En effet, l’ensemble des délégués des Caritas des sept diocèses du Sénégal se sont penchés sur la question de l’emploi des jeunes sénégalais pour trouver des modèles d’insertion qui « permettent de faire face à l’immigration illégale ». Ils ont ainsi pu visiter les facteurs à succès du projet de centre d’incubation pour les jeunes, sous la houlette du Professeur Agrégé d’Economie Joseph François Cabral de l’Université Cheikh Anta Diop.
Pourtant, souligne-t-il, plusieurs initiatives ont été développées dans le cadre de la promotion de l’emploi des jeunes, pour notamment accroître le niveau d’entreprenariat et d’auto-emploi chez les jeunes, améliorer leur employabilité sur le marché du travail, agir sur l’accès au financement et améliorer l’accès à l’information sur le marché du travail.
Des initiatives appuyées par plusieurs structures intervenant sur les questions de l’emploi des jeunes telles que la Direction de l’emploi, le Programme sénégalais pour l’entreprenariat des jeunes (PSEJ), le Programme des Domaines Agricoles Communautaires (PRODAC) et l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi Jeune (ANPEJ)
Malheureusement, de nombreux facteurs comme ceux pointés par le Pr Cabral plombent encore ces diverses tentatives, à savoir : la dépendance des politiques de l’emploi jeune au financement externe », la domination du marché de l’emploi par les non-qualifiés qui en constituent la part la plus importante et le fait que près d’un jeune sur deux n’est pas instruit, soit 46%. « Seuls 3% des jeunes ont atteint le niveau supérieur et 8% le niveau secondaire ».
Face à une telle situation, quel modèle d’insertion des jeunes sur le marché de l’emploi, surtout quand on sait que 12.000 migrants clandestins sénégalais ont débarqué sur les côtes italiennes entre 2015 et 2016 ?
Pour le Pr Cabral, même si aucun modèle d’insertion n’est parfait, « si l’on veut mieux répondre aux besoins des jeunes dont la majorité est en bute à une situation de précarité puisque présentant un profil non qualifié sur le marché du travail, une correction spatiale dans l’allocation des ressources destinées au secteur de l’emploi jeune, par une meilleure répartition des projets et programmes au profit des foyers de pauvreté, est indispensable ».
C’est ainsi qu’il suggère de favoriser la mise en place de projets de centres d’incubation. Il s’agit selon lui d’une « expérience à succès bâtie autour d’un modèle institutionnel innovant qui met en relation plusieurs institutions dans une approche gagnant-gagnant », à savoir : le secteur privé, l’université, les organismes de financement et les collectivités locales.
Le succès et l’efficacité du projet de centre d’incubation résident dans sa capacité à « desserrer les goulots d’étranglement liés au mauvais fonctionnement des institutions et qui font le lit de la migration illégale », a encore expliqué le Pr Cabral, en permettant aux jeunes l’accès à un stock de capital humain, au financement et à la terre.
C’est ainsi que convaincue de la pertinence d’un tel modèle d’insertion des jeunes sur le marché de l’emploi, Caritas Sénégal recommande aux décideurs et autres acteurs, en vue de réduire les risques encourus de l’immigration clandestine, de capitaliser les expériences pertinentes d’insertion des jeunes, fondées sur le partenariat entre collectivités locales, système de formation, organisations de la société civile, partenaires techniques et financiers et le secteur privé.
Une recommandation qui fait écho à l’appel lancé au début des travaux par son Président, Son Excellence Mgr Jean Bassène, Evêque de Kolda : « Il nous faut chercher, avec tous les responsables, les moyens de redonner espoir à notre jeunesse », confrontée aux « drames incessants sur les routes de la migration clandestine, la traite des êtres humains, l’esclavage et la violence »