En marge de la 22ème Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 22) qui vient juste de clôturer ses travaux le 18 novembre 2016 à Marrakech,en laissant derrière elle un certain nombre des questions non résolues, le président congolais, Denis Sassou N’Guesso, a présenté son projet d’un Fonds bleu pour le bassin du Congo. Une initiative qui mérite d’être applaudie et soutenue fermement, si elle peut soulager un tant soit peu les souffrances et améliorer la qualité de vie de pauvres paysans qui survivent grâce à la chasse, à la cueillette et à couper du bois pour cuisiner, se chauffer, s’éclairer, mais également pour construire des cases et aussi des racines et écorces d’arbres comme substances médicamenteuses pour se soigner.
Maintenant que les lampions de la COP22 se sont éteints, sous le signe de l’action, il revient aux dirigeants politiques et économiques de traduire leurs promesses d’appui financier et technologique en propositions concrètes et d’appliquer les recommandations formulées lors de cette conférence. C’est dans ce contexte que s’inscrit justement la démarche du président Sassou N’Guesso, le doyen des présidents en exercice en Afrique centrale, d’avoir pris l’initiative louable de créer un Fonds bleu, à hauteur de 100 millions d’euros, pour promouvoir la réduction des effets du réchauffement climatique dans le bassin du Congo.
Mais pour que de tels engagements n’en restent pas à des déclarations d’intentions, il serait souhaitable que le président congolais donne le ton et sert d’exemple pour les autres, en démontrant comment il entend s’y prendre pour garantir l’effectivité d’un tel Fonds. Un fonds qui pourrait bien servir à investir dans le développement des énergies renouvelables pour préserver la forêt du bassin et stimuler en même temps l’activité économique dans une des sous-régions les plus riches du continent africain, mais qui dramatiquement est dépourvue en infrastructures de base pour réussir son décollage économique.
Au niveau international, il existe déjà un Fonds vert pour le climat, qui est un mécanisme financier des Nations unies, rattaché à la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Il représente un levier financier important dans la réalisation de mesures favorisant le développement durable et a pour objectif de réaliser le transfert de fonds des pays les plus avancés à destination des pays les plus vulnérables afin de mettre en place des projets pour combattre les effets des changements climatiques.Le but fixé par les États-parties à la CCNUCC est de réussir à financer le Fonds à hauteur de 100 milliards de dollars américains par an d’ici à 2020. Mais seulement, il y a encore beaucoup d’incertitudes sur la provenance de ces fonds et de doutes persistants quant à la volonté manifeste de la communauté internationale de matérialiser cette initiative.
Ce qui est vrai, c’est que l’inaction ne constitue pas une réponse appropriée au réchauffement climatique. En effet, il existe suffisamment de preuves scientifiques pour affirmer que le réchauffement climatique, résultat du changement climatique, est très probablement lié aux activités humaines, notamment le mode de vie, de production et de consommation. Un défi de notre époque que nous devons tous et absolument relever en protégeant notre environnement.Il est donc nécessaire que les dirigeants politiques agissent, de façon efficace et efficiente, afin de trouver un équilibre entre leur obligation de procurer le bien-être socio-économique à leur population et leur devoir de protéger l’environnement pour les générations à venir.
Comment protéger la forêt du bassin du Congo ?
Il est indéniable que la forêt joue un rôle important dans le processus de réduction des émissions de GES, dans la mesure où elle contribue au stockage de carbone et à l’atténuation des émissions anthropiques. En effet, les arbres retiennent le CO2 par le mécanisme de la photosynthèse, rejetant l’O2 et stockant le carbone atmosphérique.
Avec plus de 200 millions d’hectares de la forêt tropicale, le bassin du Congo, est le second poumon écologique du monde et le plus grand réservoir de biodiversité en Afrique. Cette forêt libère de l’oxygène indispensable à la vie de toute l’humanité toute entière. Les écosystèmes qui se trouvent dans cette forêt jouent un rôle crucial et primordial en matière d’atténuation des répercussions des changements climatiques et de protection de la biodiversité.
Mais la forêt du bassin du Congo est aussi une ressource vitale du mode de vie traditionnel des autochtones et un gagne-pain pour la grande majorité de la population du bassin du Congo. Les activités socio-économiques de la plupart des paysans d’Afrique centrale sont concentrées dans et autour de cette forêt. Ces populations ne disposant pas de l’énergie électrique, dépendent quasi quotidiennement de la forêt pour leur survie.
Si la communauté internationale reconnait que la forêt du bassin du Congo contribue énormément à la réduction des émissions de gaz à effet de serre et que sa préservation est un bénéfice pour le bien-être de l’humanité toute entière, il serait juste et équitable que les populations environnantes qui consentent davantage d’efforts pour limiter l’exploitation de cette immense ressource forestière reçoivent, en contrepartie, une rétribution correspondant aux sacrifices qu’ils s’imposent.
C’est ici qu’il est nécessaire de rappeler, si besoin en était encore, le principe 7 de la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement de 1992 : Responsabilités communes mais différenciées.
« Les États doivent coopérer dans un esprit de partenariat mondial en vue de conserver, de protéger et de rétablir la santé et l’intégrité de l’écosystème terrestre. Étant donné la diversité des rôles joués dans la dégradation de l’environnement mondial, les États ont des responsabilités communes mais différenciées. Les pays développés admettent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en faveur du développement durable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l’environnement mondial et des techniques et des ressources financières dont ils disposent. »
Enfin, toutes choses étant égales par ailleurs, le jeu combiné de l’exploitation excessive des ressources naturelles et énergétiques actuelle et de la progression constante du réchauffement planétaire n’est pas de nature à soulager les craintes et les préoccupations croissantes suscitées par les changements climatiques et les besoins d’adaptation qui en découlent.
Nous assistons déjà à une recrudescence de phénomènes de détérioration rapide de l’environnement qui contraint des dizaines de millions de personnes aux quatre coins du monde d’abandonner, soit temporairement soit définitivement, leur milieu de vie naturel à cause notamment des inondations massives et généralisées provoquées par des pluies diluviennes qui s’abattent de plus en plus fréquemment sur bien des régions du monde, avec comme conséquences possibles les océans qui se dilatent et le niveau élevé des eaux qui inonde des régions entières, ralentissant brutalement de ce fait tout activité économique et provoquant ainsi des problèmes de migration de population. Les premiers qui subissent de plein fouet les impacts du changement climatique sont notamment les pays en développement, pauvres et vulnérables, qui manquent des ressources financières et technologiques conséquentes pour répondre aux défis climatiques.
Isidore KWANDJA NGEMBO, Politologue