Depuis quelques années notre pays est sous l`emprise d`un terrorisme intellectuel et médiatique dont les dérives, haineuses à souhait, musèlent les tentatives d`exprimer un point de vue différent. Une pensée unique, tournée exclusivement vers la démolition du Président Wade et de sa famille, obnubile certains esprits et inhibe la capacité de jugement objectif de la plupart des observateurs.

Tout est parti depuis l’an 2000 du malentendu, savamment entretenu par la presse, selon lequel les journalistes et leurs organes auraient joué un rôle prépondérant, pour ne pas dire exclusif, dans l’accession au pouvoir de Maître Abdoulaye WADE. Sans minimiser le rôle de la presse, il convient tout de même de dire que si elle rend compte des actions qui concourent à animer la vie politique elle ne les mène pas. Une radioscopie fine des faits et méfaits des journalistes rendrait d`ailleurs plus humble cette corporation qui n’est pas à l’abri de la corruption et des travers qui minent dangereusement les mœurs de notre société.

A cela est venu se greffer un second malentendu: celui de l`impossibilité de gouverner le pays à plusieurs après l’avoir conquis à plusieurs: éclatement de la coalition victorieuse en 2000 au cours de l’an 1 de l`alternance, réduction de la victoire du Peuple tout entier à celle d’un homme, de son parti, de sa famille et de ses amis…

Ces deux malentendus dont les différents protagonistes s’invectivent, se fâchent, se séparent tantôt, puis selon l’air du temps se retrouvent, s’encensent, et s’allient, vire à une tragicomédie, de plus en plus sanglante, sur le dos de notre Peuple.

Le Peuple sénégalais semble plus fin qu’il n’y parait cependant: A chaque consultation électorale, le verdict des urnes désarçonne les politicards et repose, quant au fond, une ferme exigence du Peuple souverain d’être gouverné autrement et mieux. Il finira bien par y arriver…

Tout ceci pour dire que l’expérience vécue depuis l’an 2000 doit servir de base à toute réflexion stratégique pour un vote avisé au second tour de la présidentielle de 2012.

Il ne s’agit pas, cette fois ci, d’un simple choix entre deux hommes ni entre deux programmes. Il s’agit, davantage, de mettre fin à une époque et de restaurer une véritable perspective pour le Sénégal. Question sérieuse, enjeu capital.

Maitre Abdoulaye WADE fait face a Macky SALL. Les seuls états de service de Macky Sall connus, à ce jour, sont les suivants: militant de Wade, Ministre de Wade, Premier Ministre de Wade, Président de l’Assemblée Nationale sous Wade et, plus récemment, fâché avec Wade et opposant à Wade…
En vérité, Macky Sall fait partie du bilan de Wade.

Sans chercher à arbitrer le conflit qui a présidé à la séparation des deux hommes, l’on peut se demander s’il est légitime de fonder l’ambition de diriger notre pays sur un contentieux personnel. Pire, la coalition circonstancielle qui est en train de voir le jour autour de Macky SALL ressemble, à s’y méprendre, au patchwork d’ambitions inconciliables qui conduisit Maitre Wade au pouvoir en l’an 2000 et qui a fini par éclater… Les mêmes acteurs se retrouvent pour la plupart autour de Macky Sall. Ils reconduiront les mêmes comportements sectaires au lendemain d`une éventuelle victoire.

Maitre Abdoulaye WADE n’est pas un saint, loin s’en faut. Il n’est pas, non plus, le démon que la presse s’évertue à créer et à nous imposer. A titre d’exemple, il est le seul parmi tous ceux que l`on soupçonne de l’être à avoir affirmé, haut et fort: « J’ai été franc-maçon. Je ne le suis plus. » On pourrait se demander si tous ses déboires ne découlent pas de cette affirmation… Au demeurant, on aimerait bien avoir une réponse aussi claire et aussi nette de la part de tous ceux qui prétendent à nous diriger. Autant on a la faculté de demander à n’importe qui sa Religion, son ethnie, et son état-civil, autant on est fondé à demander à ceux qui aspirent à nous diriger s’ils appartiennent à une loge, à une secte ou à tout autre organisme dont les pré requis pourraient s’avérer incompatibles avec notre charte fondamentale. La transparence commence par cela: du bulletin de santé exigible à chaque candidat à la bonne moralité attendue de chacun de nos dirigeants, il n’y a pas de place pour un voile de mystère… Il reste entendu que chacun a la liberté de choisir ses fréquentations. Nous avons, à l’inverse, le droit de nous en enquérir auprès de qui aspire à nous diriger.

Macky Sall et Abdoulaye Wade ont donc en partage le même bilan. Et ce bilan n`est pas aussi négatif que les politiciens veulent le dépeindre dans leurs discours. Des réalisations importantes, visibles et tangibles sont à porter à leur actif. Ce qui est à la base de leur malentendu serait la convocation du fils de l’un par l`autre à une audition a l`Assemblée nationale… A l`échelle des intérêts supérieurs d`une nation cela est insignifiant et méritait d`être dépassé… Enfin bref…Passons…

Nos préoccupations actuelles sont ailleurs.

Ce qui est véritablement en jeu pour le Sénégal à l’occasion de ce second tour de l`élection présidentielle, c’est de se donner le moyen de favoriser l’émergence d’une nouvelle classe politique, décomplexée et détachée des modèles idéologiques surannés qui ont fini de nous obstruer l’horizon, une classe politique apte a inventer une voie alternative de développement et d’épanouissement pour notre Peuple.

Et c’est la que j’entrevois la possibilité de donner à Maitre Wade une dernière chance de se racheter. S’il ne la saisit pas, il va rejoindre les poubelles de l’Histoire. Définitivement.

Pour saisir cette chance, il lui appartient d’abord, et avant tout, de nous édifier, sans aucune équivoque possible, sur sa tentation présumée d`imposer son fils à la tête du Sénégal par des artifices anti démocratiques.

Cela est inacceptable et personne ne l`acceptera.

Karim Wade a le droit, comme tout autre sénégalais, de briguer n’importe quel poste électif. Il doit, cependant, être astreint aux mêmes conditions que tout autre sénégalais: Il doit aller à la conquête du pays par les urnes ainsi que notre système de transmission du pouvoir l’édicte.
Il n’y a aucun compromis possible sur cette question.

Maitre Wade peut, et devrait cependant, organiser la succession au sein de son parti. Cela est de sa responsabilité historique en tant que Fondateur du PDS. Si, bien entendu, il souhaite que le PDS lui survive.
Il doit également s’engager solennellement, ainsi qu`il l’a laissé entendre et dans un délai maximal de trois ans après sa réélection, à rendre la parole au Peuple souverain en raison de son âge avancé. Sans aucune possibilité de revenir sur sa parole…

A ces conditions, le choix stratégique s’imposera de voter pour Wade au second tour pour tous ceux qui ont le souci de donner une chance de germer aux nouvelles pousses politiques et citoyennes que nous appelons de nos vœux.

Car, en vérité, toute la classe politique actuelle mérite une retraite par anticipation. Et cela n`a rien à voir avec l`âge: de Talla Sylla à Maitre Wade en passant par Barthelemy Dias, Macky Sall, Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng et j`en passe, bref tous les animateurs de l`espace public depuis une cinquantaine d`années ont montré tous leurs limites. Ils incarnent, à des degrés divers certes, la décadence du modèle post colonial. Le temps de l`Indépendance véritable est à venir…

Le Futur du Sénégal de nos rêves est à inventer. Il va au delà des ambitions étriquées de nos politiciens actuels. La décolonisation mentale de nos élites reste à faire afin qu`elles aient le courage de revendiquer, pour notre Peuple, la place qui lui revient dans le concert des Nations. Le Monde, formaté depuis trois siècles à l’aune des intérêts de l’Occident, doit changer. Nous devons l’y forcer. Les règles du jeu des pouvoirs planétaires sont faites contre nous. Nous devons nous battre pour les remettre en cause. Aucun des leaders actuels n’indique cette direction. Ils veulent tous s’installer dans le même fauteuil et faire la même chose avec des acteurs différents.

Or, ce qui est en jeu, c’est la mise en œuvre des ruptures de fond, sans cesse différées, et qui risquent de passer aux oubliettes si nous tombons dans le piège d’élire un Président trop jeune par l’âge mais si vieux par le moule politicard et intrigant qui l’a formaté .

Même s’il s’en défend, Macky Sall ne fera pas plus que du Wade sans Wade.

Voter Wade le 25 mars prochain ne sera donc pas un choix du cœur mais un choix de raison.
Pour donner une chance au peuple sénégalais de sortir au plus vite du cercle vicieux hérité de la colonisation et, face à la réalité sortie des urnes le 26 février dernier, ce choix stratégique s`impose à nous.

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