La meilleure façon de se défendre c’est d’attaquer. C’est à cet exercice que s’est livré, hier, l’ancien Président de la République, Me Abdoulaye Wade, par ailleurs, secrétaire général national du Pds, à sa résidence de Fann. Contraint qu’il était, dit-on, par ses proches et le Pds, au regard des accusations récurrentes de détournement, de pillage de ressources publiques, dont serait coupable son régime. Très en verve, l’ancien Président s’est mis dans la toge d’avocat pour prendre la défense de sa famille, Karim Wade et ses anciens ministres. Wade cogne, accuse, déballe, se défend, protège, divise et menace ! Tout, assimilé à un véritable délire par nombre de Sénégalais. Synthèse d’une rencontre très suivie. C’était la première de Wade avec la presse, depuis sa chute.

Wade demande aux nouveaux gouvernants d'arrêter les accusations contre ses anciens collaborateurs et lui
« On n'a emmené aucun mobilier du palais, si ce n’est que deux tableaux offerts par le roi du Maroc», a déclaré le prédécesseur de Macky Sall. Concernant les véhicules de la Présidence, Wade affirme avoir laissé à son successeur plus de 200 voitures. Ce sont les partisans du nouveau Président qui l’auraient abusé, lui faisant croire que le parc automobile de la présidence a été entièrement pillé. Il a vivement dénoncé les accusations dont sont victimes ses partisans et lui, en particulier, son fils Karim, « parce qu'il est le fils du chef de l'Etat sortant ». Sur la gestion de l'Anoci, pour laquelle son fils est toujours cité, Wade, se demande pourquoi les gens ne parlent pas d'Abdoulaye Baldé, alors qu'il en était le secrétaire exécutif, gestionnaire des fonds. «Je suis un homme de bonne volonté», s'est-il glorifié. Cependant, Wade avertit : « il faut que les partisans du nouveau Président Macky Sall arrêtent les accusations sans fondement». C‘est en ce sens qu’il propose un jury d'honneur devant lequel se présenteraient tous ceux qui seraient susceptibles d'avoir versé dans des affaires illicites, sous son magistère, lui compris, même s'il a plusieurs fois fait état de son statut d'ancien chef de l'Etat qui le préserve de poursuites. Mieux, pour ce faire, le Président sortant n'a pas manqué de demander un audit de tous les régimes qui se sont succédé depuis l'indépendance du Sénégal en 1960. Donc le régime de Diouf et de Senghor.
Transfert de 400 milliards vers l’étranger
A propos des 400 milliards F Cfa que ses partisans et lui auraient planqué dans des comptes à Dubaï et dans les Emirats, Wade se permettra de verser dans l’humour, en ces termes : « on a dit que mon régime a transféré 400 milliards F Cfa. Du Sénégal, on ne peut pas transférer de l’argent vers l’étranger, si ce n’est dans une monnaie autre que le CFA, sans l’accord des autorités de l’UEMOA, sans l’accord de la Banque centrale». Et de poursuivre : « et 400 milliards, si la Banque centrale l’accordait comme ça, mais ça veut dire qu’il y a des complices à la Banque centrale. 400 milliards, ce n’est pas une petite valise qu’on peut transporter». C’est ainsi qu’il laissera entendre qu’il fallait vérifier l’existence d’une telle transaction auprès de l’UEMOA et la BCEAO, avant d’accuser son régime. « Mon régime, c’est depuis 2000. Donc, de 2000 à aujourd’hui, on aurait transféré 400 milliards Cfa. D’abord, il faut contrôler pour voir si cet argent a été transféré. Je me suis donné la peine de consulter les documents de la Banque centrale, pour vérifier, je n’ai vu nullement un tel transfert», précisera-t-il.
Et Wade de s’offusquer : « lorsque dans un pays, on publie des informations sur des détournements de milliards, des transferts illicites de milliards, etc…, comprenez que chaque fois que vous écrivez ça, vous abaissez une note dans la cotation du Sénégal».
Accusations contre son régime : Wade propose un jury d’honneur
Informant qu’aucune faute de gestion ne pourra lui être reprochée, il dira qu’il n’y a rien à auditer. « Je n’ai pas d’argent », a-t-il clarifié, insistant, cependant, sur la nécessité de procéder à des audits, qu’il juge très normaux. C’est au regard de tout cela, qu’il propose l’institution d’un jury d’honneur pour faire la lumière sur les accusations de mauvaise gestion dont font l’objet son régime et sa famille, suggérant que ce jury soit constitué sur une base paritaire avec d’anciens Présidents et de personnalités. Sa mission serait de faire des enquêtes et donner des conclusions. Conseillant à son successeur de faire preuve de prudence, par rapport aux accusations contre son régime, il lui demandera de s’assurer de la véracité des allégations de ses collaborateurs, avant toute action ou décision.

Sur l'affaire des 600 véhicules de l'Etat disparus

Cette rencontre avec la presse a servi de tribune à Me Wade pour s’expliquer sur l’affaire dite des 600 véhicules disparus du parc automobile de la République, aussitôt après le départ de l’ancien régime. Sur cette affaire, le Président déchu, Abdoulaye Wade s’est attaqué au secrétaire général de la présidence, Aminata Tall. « Il ne faut pas utiliser l’appareil de l’Etat pour régler des comptes. Ce n’est pas parce que je l’ai mise à la porte, qu’elle veut se charger ainsi de moi», dira-t-il. Mieux, il explique que cette cabale des véhicules comme une bavure de son successeur qu’il accuse d’être entouré de gens incompétents.

«Dieu sait que je peux déstabiliser ce pays, si je le veux», déclare Wade


Suite aux velléités de déstabilisation du Sénégal, depuis sa résidence de Fann qui lui ont été prêtées, Wade nie en bloc mais, déclare pouvoir le faire, s’il le désirait. « Dieu sait que je peux, bel et bien, rendre ce pays ingouvernable. J’aurai juste besoin de dire à mes partisans de descendre dans les rues et de contester toutes les décisions de Macky Sall pour léser le Pds. Mais, je ne le ferai pas car, je suis un libéral, un démocrate, le chef du parti le plus important du pays, le Pds, respectueux du pouvoir et de la démocratie.
Le Président sortant défend son épouse, Viviane
« Je ne suis pas homme à me laisser faire», a lancé Me Wade, lorsqu’il a évoqué la plainte de la Fondation suisse, "Antenna Technologies" qui veut poursuivre Viviane Wade, pour se faire rembourser 835.200.000 francs Cfa. Wade qui s’est décidé à payer les créances que la fondation « Education et santé » de son épouse doit à cette fondation suisse, de s’étonner : « j’ai lu dans la presse que le ministère de la Justice avait saisi le procureur pour ouvrir une information judiciaire qui concerne la fondation de mon épouse. Mais, je pense qu’ils n’oseront pas convoquer ma femme. Imaginez que le procureur de la république convoque ma femme"
…Et blanchit ses enfants Karim et Sindiély
« Il était le président du conseil de surveillance de l’Anoci. On accuse les gens sur des bases trop légères. Ce n’est pas le ministre des infrastructures qui gère les routes. Si vous auditez Karim sur les routes, vous n’aurez rien. Il y avait un gestionnaire qui manipule les dépenses », a déclaré Wade. « Il n’y a qu’un délit de fils de chef d’Etat. Karim est présumé coupable, parce qu’il est fils de chef d’Etat. Il serait intéressant qu’on m’audite, en plus de mes enfants, pour qu’on ait la paix. Nous ne pouvons pas continuer à vivre dans cette atmosphère. On nous dit qu’on ne peut pas sortir du territoire. Il faut que ça cesse. Qu’on commence l’audit par Karim et Sindiély. Elle n’a géré que 200 millions dans le Fesman», a dit Me Wade.
Pape ou Moustapha Diop
« Le Président du Sénat s'appellerait Moustapha Diop. Il aurait eu des démêlés avec la justice, raison pour laquelle il a décidé de changer de nom pour être éligible. Pape serait le nom de son frère». C’est en sens que Me Wade dit compter saisir le procureur pour que la justice enquête sur cette affaire et, si les soupçons se confirmaient, exiger l'invalidation du dossier de Pape Diop, tête de liste de la coalition Bokk Guiss Guiss. Pour dire que le Pape du Sopi ne va jamais pardonner à son collaborateur de plus de 30 ans, d’avoir voulu fragiliser le Pds et de vouloir rejoindre Macky Sall à qui, il a promis de l’aider à gouverner sans aucun problème.
«Comment Niasse s'est enrichi…»

Entre Wade et Moustapha Niasse, ce n'est vraiment pas le grand amour. L’ancien chef d’Etat n'a pas raté son ancien premier Ministre. Révèlant que la fortune de Niasse provient essentiellement du pétrole qui appartenait à l'Etat du Sénégal, il contera : « un jour, alors que je m'apprêtais à aller au Nigéria, le premier Ministre de l'époque, Habib Thiam, m'a dit : Vas me tirer au clair cette affaire de bateaux de pétrole que Moustapha Niasse a détournés et qui étaient destinés à l'Etat du Sénégal. Ce que j'ai fait», affirme Wade, avant de déclarer : « quand Moustapha Niasse est allé au Nigéria pour négocier du pétrole pour le Sénégal, il a ramené cette ressource pour sa société Itoc».

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